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Humour/Détente
Tchollos : Vade retro Fatalitas !
 Publié le 09/09/07  -  16 commentaires  -  19619 caractères  -  54 lectures    Autres textes du même auteur

Paul a quelques problèmes avec la "philosophie" de son paternel. 1576 marches et pas d'ascenseur, ça peut aider à remettre les idées en place.


Vade retro Fatalitas !


Le père de Paul est fataliste.


Il dit : « La vie, c’est trois quart de hasard et un quart de chance. Comment savoir qui on est vraiment ? Si ça se trouve, mon fils, tu es le plus grand golfeur de tous les temps, ou le plus exceptionnel violoncelliste de l’univers. On ne le saura jamais vu que j’t’ai jamais mis un putter ou un archet dans les mains. À part pour de rares élus, impossible de savoir qui on est, là, en dedans. C’est comme ça ».


C’est une philosophie comme une autre, loin d’Épicure, certes, pas très rock n’roll… re-certes, mais ça tient la route. Platon aurait pu en parler du fond de sa caverne et Sartre aurait sans doute pris son pied à en faire l’analyse. Le problème, c’est que cette façon de voir les choses vous encourage surtout… à ne rien faire. À quoi bon.


Paul rêve souvent de son père. Il le voit, debout au milieu d’un champ, parfois dans un stade de foot, attendant sans conviction que la foudre lui tombe sur le crâne. Morphée aime les métaphores.


Paul adore son père, là n’est pas la question. Il le trouve un peu con, c’est tout, rien de grave. Rébellion de l’adolescence dirait un psychologue, sauf que Paul a 35 ans et toutes ses dents, ou presque, et que sa révolte est toujours vive, brûlante même. Il lutte contre l’immobilisme frileux du paternel avec une seule obsession : lui démontrer que la chance sourit aux audacieux. À vrai dire, c’est le moteur de sa vie.


Alors Paul essaye tout. Du saut à l’élastique à l’ascension du Kilimandjaro, de lead guitar dans un groupe de rock alternatif, «les pussydogs lol », à acteur dramatique dans une troupe de théâtre locale, « les troubadours hurlants » , en passant par les tournois de poker, de tennis, de cricket et les concours d’imitation d’Elvis, de mangeur de saucisse (à noter, l’adéquation de ces deux épreuves, surtout pour interpréter un « my way » version le King de 1972), de bras de fer, d’apnée, etc.


Il est nul dans à peu près tout mais ne désespère pas. Et puis, ça lui fait des souvenirs : une clavicule cassée en faisant du rafting, trois dents explosées sur un ring de catch au Mexique, une fierté perdue lors d’une représentation en slip du « roi dé-Lear » , œuvre incomprise aussi bien par la critique que par les acteurs, une réputation brisée dans tous les clubs de jazz de la province ( « Miles Davis techno glubba party » est un concept sans avenir), un tennis elbow de la nuque, méga rare, un séjour dans une prison coréenne, un… la liste est longue.


Aujourd’hui, il s’attaque à un gros morceau : une course à New York. Pas le marathon. Trop de monde, trop banal. Pourquoi serpenter dans les rues de big apple quand on peut grimper « top of the world » ? Chaque année, en parallèle à la glorieuse épreuve pédestre, l’Empire state building devient l’aire de jeu des New York road runners, une bande de déchaînés internationaux qui jouent des coudes pour gravir les 86 étages et 1576 marches de la plus célèbre tour du monde. Le record est de 9 minutes et 33 secondes. Une broutille.


***


- … pour terminer, je citerai Greg Oslowsky, le recordman du nombre de victoires : « si t’as une crampe, accroche-toi à la rampe, si t’as du cœur, l’Empire fera ton bonheur » , bonne chance à tous.


Les 521 participants applaudirent et sifflèrent à l’unisson. L’organisateur déposa le micro, se saisit d’un révolver, pointa le ciel et… PAN.


Paul patienta quelques secondes pour éviter la ruée. Un pingouin le doubla, puis trois moines franciscains. Quand un couple déguisé en Bonnie and Clyde le dépassa suivi de près par un avatar de Casimir, il décida qu’il était temps d’entrer en scène. Il traversa le grand hall en trottinant puis s’engouffra dans la cage d’escalier avec un enthousiasme contenu. Il trébucha sur la troisième marche, tomba tête la première, et se retrouva à genoux, le nez coincé entre les fesses d’un solide gaillard.


- Eh !

- Désolé.

- Fais gaffe, idiot, ajouta l’infortuné propriétaire du popotin.


Paul entendit : « pourriez-vous rester maître de vos mouvements cher ami ». Devant un gringalet, il aurait sans doute relevé l’ « idiot » mais, face à la masse musculaire du mastodonte, à sa voix rauque et son tatouage « shit happens » , il le trouva plein de courtoisie et de délicatesse.


Le rythme était soutenu. Pas celui de Paul, celui du colosse, loin devant, 3 étages plus haut. Paul, lui, crachait déjà ses poumons, il était à peine au quatrième.


Au 8ème, un quinquagénaire maladroit se fracassa le crâne contre une clinche. Paul le doubla, une main sur les yeux pour ne pas voir le sang.


Au 12ème, un bedonnant, cigarette au bec, le laissa sur place.


Au 22ème, il rencontra Louise, nonchalante, délicieusement sexy dans un survêt Tacchini. Elle était venue avec des amies, un enterrement de vie de jeune fille. Ses camarades batifolaient en pouffant au 32ème, fières de leur excellente idée. Louise traînait les pieds en maugréant contre les traditions débiles et les concours d’originalité : « 1500 marches, non mais ! On pourrait pas se bourrer la gueule et mater des chippendales, comme tout le monde ».


- Je commençais à croire que j’allais finir dernier, je veux dire, devant le cul-de-jatte mais… enfin, merci quoi, souffla Paul en arrivant à sa hauteur.

- De rien.

- Vous avez sauvé mon honneur.

- Ce n’est pas comme votre short.


Paul baissa les yeux avec anxiété.


- Je plaisante, dit Louise, il est très bien.

- Ah, ok. J’ai le cerveau en manque d’oxygène, je me souviens à peine de mon nom, alors plaisanter, vous pensez.

- On vous a forcé à venir ici aussi ?

- Ah, non, je suis à fond là. J’ai la capacité pulmonaire d’un enfant de 3 ans qui fume trois paquets par jour.

- Ok, dit-elle en souriant, laissant apparaître deux ravissantes fossettes.

- Eh bien, hésita Paul, sous le charme, je vais devoir prendre le large, je leur ai laissé un peu d’avance, histoire de corser les choses mais là...

- Je comprends, foncez ! dit-elle en l’encourageant d’un geste, poing serré.


Il accélérera de manière virile jusqu’à ce qu’il disparaisse de son champ de vision. Ses cuisses lui rappelèrent alors qu’il n’avait pas intérêt à faire le mariolle, la crampe menaça, et il reprit sa cadence de limace en cure de désintox.


Puis, soudain, entre le 38ème et le 39ème étage, une douleur dans le bras droit, une terrible pression sur la poitrine, un voile obscur. Le monde vacille, son corps implose, il sombre.


Dieu ne lésinait pas sur les effets. Paul vit le tunnel et tout et tout, comme dans les livres, comme sur paranormal TV. La lumière l’enlaça, très new age comme sensation, puis une forme se matérialisa au bout du tunnel, une ombre ondulante, miroitante, comme déformée par la chaleur. Elle se mit en mouvement, devenant plus nette en se rapprochant. Paul commença à en distinguer les contours. La brume devint silhouette, le mirage devint humanoïde. Il put enfin mettre un nom sur le visiteur de l’au-delà. Ce n’était pas sa mère, ce n’était pas son oncle Charlie, c’était… Greg Oslowsky. Un petit homme haut comme un tabouret, pas plus large qu’un bottin, qui portait un short rouge moulant des 70’s façon « drôle de dames » , et un marcel bleu recouvert du dossard 21 : « Oslow’ the champ’ » .


- Salut mon gars.

- Sa… salut monsieur Oslowsky.

- C’est le cœur mon gars.

- Je vois ça.

- Ouaip, on plaisante pas avec cet organe.

- Si t’as du cœur, l’empire fera ton bonheur ? ironisa Paul.

- Ouais, j’ai dû dire ça une fois. J’étais stone la plupart du temps, ah les seventies ! Fallait voir ça !

- On fait quoi là ?

- On patiente.

- Pourquoi je ne suis pas triste ? Le paradis m’attend ?

- Non, c’est chimique, là ton cerveau sécrète un puissant inhibiteur. Tu planes.

- Cool.


Greg Oslowsky porta une main à son oreille.


- Ah, j’ai des nouvelles, je crois.

- De ?

- Accroche-toi à la rampe mon gars.

- Pardon ? Je v…


Paul n’acheva pas sa phrase, une poussée supersonique le propulsa dans le néant, ses lèvres se retroussèrent, il hurla, ferma les yeux… fondu au noir.


Il se réveilla, le nez bloqué entre deux fesses qui, heureusement, n’avaient pas encore eu le temps de transpirer.


- Eh !

- Pa… pa… pardon.

- Fais gaffe, idiot, ajouta le géant.


Paul se releva, déboussolé, noyé sous des sentiments contrastés de peur, d’émerveillement, de soulagement et d’incompréhension.


- J’ai rêvé ? dit-il tout haut.

- Pardon ? demanda un voisin de marche.

- Rien, rien.


Il zigzagua en fouillant sa raison. Deux secouristes le bousculèrent dans leur course effrénée pour venir en aide au malheureux qui s’était cogné au 8ème.


Au 10ème, un cadre de Wall Street, affligé d’une bouée naturelle, le doubla en allumant une cigarette.


Au 18ème, il fut rejoint par Louise.


- Merci, je ne finirai pas dernière comme ça, dit-elle tout sourire.


Paul leva les yeux.


- C’est moi qui dis ça, bafouilla-t-il, comme un zombie.

- Hein ?


Elle accéléra pour se débarrasser de cet étrange individu.


Entre le 38ème et le 39ème étage, une douleur dans le bras droit, une terrible pression sur la poitrine, un voile obscur. Le monde vacille, son corps implose, il sombre. Du déjà vu quoi, au mot près…


- T’es pas fut fut comme mec toi, siffla Greg Oslowsky

- Mais, c’est que…

- … t’es pas fut fut, CQFD.

- Avouez qu’il y a de quoi être perturbé.

- Mouais.

- C’est quoi le deal, je ne comprends pas.

- Deal ? Tu te crois où ? Sonnant la cloche à une séance du Nasdaq ?

- Quel mot voulez-vous que j’utilise, grinça Paul.

- Révélation, leçon, voie… un truc en rapport avec l’événement quoi, expliqua Greg en s’accompagnant de grands gestes.

- Je dois faire quoi alors ?

- Tu ne vois pas là-dedans une occasion de quelque chose.

- Comprends rien, chuchota Paul.

- Une occasion de faire les choses différemment.

- Mais quelles choses ? Je voudr…


Greg Oslowsky leva une main autoritaire et porta un index à son oreille droite.


- Mmh, mmh, ok, je vois, dit-il, droit comme un caporal au garde à vous.

- Vous parlez à qui nom de D…


Trop tard. Propulsion, 9 G dans la tronche, bave aux lèvres… réveil entre deux fesses.


- Eh !

- ...ieu.

- Fais gaffe, idiot.

- Pardon, pardon.


Paul s’appuya contre un mur, mains serrées sur la rampe, cherchant son second souffle. Il répéta en boucle les mots d’Oslowsky : « Une occasion de faire les choses différemment, une occasion de faire les choses différemment, une occas... »


Je ne vais pas me taper 38 étages ad vitam æternam… faire les choses autrement ? Changer quelque chose ?.


Soudain, une ampoule s’alluma au-dessus de sa tête, clic !


- J’ai trouvé, s’écria-t-il, apprenti Archimède en short et basket.


Il se précipita dans les escaliers avec l’énergie d’un possédé.


2000 ans de morale judéo-chrétienne, ça ouvre des perspectives. Paul devait sauver une vie ! Voilà l’explication. Dieu le renvoyait pour accomplir une B.A., implacable. Il sautait au-dessus des marches, poussait, virevoltait, volait presque. Un seul objectif : sauver Monsieur Clinche.


Robert Huchton fouillait sa poche à la recherche d’une barre vitaminée. Il avait adopté la « Vitamin way of life » depuis trois ans. Il aurait avalé n’importe quoi pourvu que l’emballage dise « effet jeunesse garanti » . Le matin, il prenait une douzaine de pilules. Entre autres : contre la chute des cheveux, la remontée des testicules, la descente des seins, le cholestérol. Pour l’oxygénation musculaire, la résistance bactérienne, l’anti-transpiration, la mémoire, etc. Aucune ne proposait de remède contre la maladresse. Robert Hutchon lâcha la friandise, trébucha en tentant de la ramasser, tituba, et fonça, tête la première, vers la porte du 9ème sur laquelle un graffiti prophétique disait : « Les cons cognent aux portes, les autres l’ouvrent » . Son front qui fut un temps dégarni, avant les implants, plongea vers la clinche, comme une flèche vers sa cible. 20 centimètres, 15, 10, 5… stop. Paul lui attrapa le bras de justesse, le déviant de sa funeste route. Robert percuta la porte de l’épaule. Douloureux mais très supportable.


- Ça va ? demanda Paul qui respirait comme un taureau en rut.


Dans ses cuisses, des globules diaboliques avaient allumé des feux d’enfer.


- Oui, merci.


Paul, main sur les hanches, souriait à s’en faire péter les zygomatiques. Personne ne pouvait mesurer la portée de son geste mais ça ne gâchait pas sa satisfaction. Il avait sauvé une vie, quelle sensation ! Il s’élança dans les étages, un sourire béat accroché aux lèvres, le faciès paralysé sur un délire orgasmique, comme De Niro à la fin de « il était une fois l’Amérique » .


Puis, entre le 38ème et le 39ème étage. Une douleur dans le bras droit


- Hein ?


Une terrible pression sur la poitrine


- Non, non, non.


Un voile obscur. Le monde vacille


- Zut.


Son corps implose


- Flûte.


Il sombre.


- Crotte.


***


- Vous vous foutez de moi, beugla Paul en menaçant Oslowsky d’un index accusateur.

- Donc, Dieu te tue d’une crise cardiaque puis te renvoie pour sauver la vie de quelqu’un. Logique.

- Ben oui.

- S’il peut te tuer puis te redonner la vie, pourquoi il ne sauverait pas directement le bonhomme ?

- Euh, les voies du seigneur sont impénétrables.

- Faut pas croire tout ce qu’on dit.

- Mais merde, je ne sais plus quoi faire.

- Avoir le droit de vie ou de mort, ça n’a rien de transcendant, mon gars. Y a plein de débiles qui ont ce pouvoir.

- Prufffffff, baragouina Paul.


Son cerveau partait en vacances.


- Eh, eh. Tu baisses déjà les bras ?

- Bah.

- Je te croyais plus solide.

- J’ai raté mon diplôme en « énigme divine ».

- Il y a des choses bien plus compliquées que la vie ou la mort. Plus inexplicables. Plus magiques.

- Si vous le dites.

- Ah, j’ai un appel, dit Oslowsky en posant une paume sur son oreille, façon Gilbert Bécaud fait du jogging.

- Vous avez un bon forfait on dirait.

- T’es mort deux ou trois fois ?

- Aujourd’hui, trois, mais demain, j’espère battre mon record.

- Trois, ok. Bon, ça risque d’être ta dernière chance alors ne foire pas cette f…


Catapultage, accélération de cinglé, transformation en comète, yeux qui s’enfoncent, atterrissage moelleux sur troufignon.


- Eh !

- Oh, fais pas chier ducon !

- Hein ?

- J’ai pas fait exprès. Tu crois que ça m’amuse de me coltiner la raie de tes fesses toutes les 20 minutes ?

- Hein ?

- LA FERME !


Le colosse se recroquevilla contre le mur comme une tortue sous sa carapace. Paul, transformé en Hulk sans les rayons gamma, était submergé de colère. Il se mit à avaler les marches, 4 à 4, animé par l’énergie du désespoir. Il n’avait pas l’ombre de l’ombre d’une poussière de particule d’idée.


Il sauva Robert sans dire un mot, le visage aussi expressif qu’une momie un lendemain de cuite.


Au 12ème, toujours excité par l’overdose d’adrénaline, il interpella le bedonnant fumeur.


- T’as l’air malin avec ta clope.

- Pardon ?

- Tu te débrouilles pas mal malgré ta ceinture en cholestérol pur et tes poumons couleur charbon.

- Quel est votre problème ?

- Mon père pense que c’est la chance qui dicte nos vies. Vous débordez de chance, mon vieux, et vous gâchez tout.

- Mais…


Paul, surpris par ses propres mots, força l’allure pour quitter le quidam. C’était la première fois de sa vie qu’il faisait la morale. Il détestait les faux pasteurs et les chantres des leçons de mœurs, pourtant, sur le coup, il avait pris son pied.


Simon Lowell, médusé, observa longtemps le mégot qui se consumait entre ses doigts. Dans la fumée se dessina l’image de sa mère. Cela faisait 20 ans qu’il n’avait pas pensé à elle. Des souvenirs fugaces et des sensations du passé le prirent d’assaut comme autant de soldats enragés à la conquête de son orgueilleuse carcasse. Les quelques mots confus de l’inconnu n’avaient rien à voir là-dedans, quoique. Simon fit demi-tour et dévala les étages, poussé par le besoin irraisonné de parler à quelqu’un qui l’aime.


Au 22ème, la pression retomba. Paul avait brûlé une quantité dangereuse de calories et sa tension frôlait le plancher. La rage n’avait plus de carburant. Ses épaules s’affaissèrent, ses traits redevinrent humains, et il retrouva son rythme d’ours acariâtre. Il baissa la tête, concentré sur le bout de ses baskets. Il la releva un instant comme un nageur de crawl reprenant son souffle. Louise zigzaguait devant lui, toujours aussi charmante, sa silhouette gracile tanguait, fatiguée par l’ennui.


- Bonjour, hésita Paul.

- Bonjour.

- Alors, comme ça, on vous a forcée à venir.

- Pardon ?

- Euh, on voit bien que c’est pas trop votre truc, euh, les marches.

- Non, en effet, dit-elle.

- Donc, j’en conclus qu’on vous a obligée.

- Voilà, en quelque sorte.

- Paul, dit-il en posant une main sur sa poitrine.

- Louise.

- Enchanté, Louise. Laissez-moi deviner. Alors, euh, un petit ami sportif qui s’entraîne pour l’iron man d’Hawaï et qui vous a convaincue de le suivre ? Un pari perdu avec… votre petit ami ? Vous devez monter car votre petit ami vous a préparé un dîner romantique là-haut, pour vous demander votre main ?

- Vous voulez savoir si j’ai un petit ami ?

- J’ai manqué de subtilité vous croyez ?

- Et si je vous dis que j’en ai un.

- Et bien, au moins, j’aurais une bonne raison pour sauter par une fenêtre.

- Non, je n’en ai pas.

- Oh, zut, je voulais tant le rencontrer.


Elle tenta de contenir un sourire mais ses fossettes la trahirent.


- Vous êtes fou non ? ajouta-t-elle.

- Désespéré. C’est un synonyme.

- Je suis là parce que mon amie Irène va se marier.

- Quelle horreur !

- Vous êtes contre le mariage ?

- Ça dépend, et vous ?

- Je suis contre.

- Moi aussi, beurk.


Elle rit sans se retenir cette fois. Ils échangèrent un long regard.


Ils discutèrent sans temps morts jusqu’au sommet. Ce n’est qu’à ce moment-là que Paul prit conscience de sa « non-mort ». Il avait franchi le 39ème sans s’en rendre compte, hypnotisé par les lèvres de Louise. Il porta une main sur son front. Soudain, tout lui parut irréel. Il ferma les yeux. Était-il mort ? Avait-il seulement rêvé ? Il souleva lentement les paupières, inquiet. Louise était toujours là. Elle fixait sur lui de grands yeux verts interrogateurs.


- Ça va Paul ?


Il sourit.


- Ça va très, très bien. Ça vous dirait un café ?

- Oui, mais à vrai dire, je préfèrerais une bouteille d’eau et un bain de pieds.

- Banco.


***


Au milieu de la lumière, Greg Oslowsky se saisit d’une feuille glissée dans son short. Il la déplia pour découvrir une série de phrases suivies par des cases. Il posa une main sur son oreille et un crayon apparut. Il se concentra pour ne pas dépasser.


« Tenir tête au colosse ».


Il cocha.


« Sauver Robert » .


Il cocha.


« Ramener une brebis sur le droit chemin » .


Il cocha.


Il relut plusieurs fois la dernière phrase, aussi heureux que quand il gagnait une course.


« Organiser une rencontre d’âmes sœurs ».


Il cocha.


***


Le lendemain, au domicile du père de Paul.


- …impossible de savoir qui on est vraiment, ça dépend de la chance, du has…

- Tu as raison, p’a, mentit Paul.

- Ah ?

- Il y a quelques heures, j’ai eu de la chance. J’ai rencontré quelqu’un d’exceptionnel.

- C’est génial.

- P’a, peut-être qu’on ne saura jamais qui on est en dedans.

- C’est sûr.

- Mais, c’est dingue comme on s’en fout quand on est amoureux.


 
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   Bidis   
10/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Clinche : n'existe pas.
Clenche : levier oscillant autour de l'axe d'un loquet, et venant s'engager dans un mentonnet fixé sur le dormant.
Ici, il s'agit de la poignée de la porte, la clenche étant en fait le mécanisme de fermeture et non l'élément extérieur et préhensible...
Voilà ce qu'un bon correcteur (de métier), à mon avis, indiquera à l'auteur au moment de la publication.
Et moi, j'achète.
Livre de chevet pour petit cafard du soir...
Ici, en plus de rire, on se fatigue les neurones... Je reprendrai un jour ou l'autre la lecture de cette nouvelle depuis le début pour recommencer ce jubilatoire exercice...

   Cyberalx   
10/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Ce n'est pas aussi transcendant que ton dernier texte (c'est à cause de la fin) mais ça reste un texte trés drôle, la morale de la fin comme quoi l'amour efface tous les soucis me navre par contre, on a assez de pub pour l'amour sans en rajouter une couche (trés subjectif, je vous le concède).

Bien écrit, j'ai envie de dire comme d'habitude, peu importe le nombre de pages que pond Tchollos, il reste agréable à lire et trop court.

En passant, j'ai beaucoup aimé le dialogue sur la technique de drague du mec.

Pour ce qui est de la clinche, Bidis, tu te trompe, j'en ai peur, il y a les deux :
http://fr.wiktionary.org/wiki/clinche

Bravo Tchollos, je n'ai rien relevé de grave à part dans "un voile obscurE", il est obscur le voile, non ?

   Absolue   
11/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
C'est vrai que la clinche existe, on peut dire les 2...
J'ai vraiment aimé ce texte. Ca se lit facilement, c'est original, drôle et il y a du suspens. Un peu déprimant par moments pour moi qui aimerais croire que quelque chose existe en dehors du ''chimique", mais bon:-). Merci pour ce moment!

   Otus   
11/9/2007
Dialogues bien léchés, drôles et vifs, histoire métaphysique et un poil tordue, juste comme je les aime.
En un mot comme en mille: Bravo.

   Iris   
12/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
10 pages de pur bonheur.

J'ai adoré. Tout : le fond, la forme, la chute (malheureusement un peu gâchée pour moi à cause d'un évènement extérieur), la syntaxe, la vocabulaire, les dialogues piquants de réalité. Un mot, un seul : GENIAL !

A lire d'une seule traite, sans s'arrêter, sans même reprendre son souffle.

L'attention ne retombe qu'à un seul endroit, à la page 5, à la seconde réincarnation de Paul. Le dialogue du réveil est un peu "plat"...

Mais l'idée m'a laissé béat d'admiration : un simple homme, un peu fils à papa sur les bord, qui meurt, ressucite , re-meurt, re-ressucite, et qui en a assez de monter sans cesse ces escaliers, qui ressembleraient un peu au supplice de Sysiphe. Je suis persuadé, que s'il se retrouvait en face de Dieu lui-même, il serait prêt à la houspiller ouvertement !

Quant à la chute... l'apogée du plaisir ! La dernière réplique cinglante du fils m'a fait exploser d'un rire homérique, que j'ai eut bien du mal à calmer !

Pour faire bref, BRAVO.


Mon moment préféré : p7 :
"-Eh !
- Oh, fais pas chier ducon !
- Hein ?
- J'ai pas fais exprès, tu crois que ça m'amuse de me coltiner la raie de tes fesse toutes les 20 minutes ?
- Hein ?
- LA FERME ! "

Poilant, tout simplement, comme le reste de la nouvelle.

   Lariviere   
13/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
C'est un texte que j'aime beaucoup.
J'adore particulièrement les récits où les premières lignes vous font directement rentrer dans le vif du sujet.
La densité est posée. On n'a plus qu'a suivre...
Du vrai concentré de talent et de drolerie et qui reste pourtant facile à lire.
C'est réjouissant.
L'idée de la course comme parabole ascensionnelle existentielle est géniale.
L'idée de fin me semble décevante et en même temps...

   guanaco   
13/9/2007
 a aimé ce texte 
Bien ↑
C'est ce que j'appelle un texte frais.
On peut critiquer le parallèle un peu facile entre l'ascension et l'Ascension mais l'enchainement des épisodes de rédemption est très réussi.
Ce texte, avec ces allers et retours entre Ciel et Terre, reprend plus le mouvement des coureurs qui montent, doublent, se font doubler à nouveau, croisent ceux qui redescendent et qui n'en peuvent plus...c'est cette dynamique qui m'a bien plu et qui fait que j'ai fini presque aussi essoufflé que les coureurs!
Un bon divertissement.
Mais sûrement comme d'autres, je crois qu'on est loin d'un Milo ou d'une Meilinn
Merci Tcho'

   Ninjavert   
21/9/2007
 a aimé ce texte 
Bien
Aaaah Tchollos...

J'ai bien aimé ce texte, mais comme d'autres, je l'ai trouvé moins bon.
Depuis "Trompe la mort, trompe l'ennui" c'est ton premier texte qui me laisse ce petit arrière goût d'imperfection, qui m'a un peu laissé sur ma faim.

Poutant y a plein de choses qui m'ont plues : l'ambiance globale, le thème de la course un peu débile, l'histoire des "réincarnations"...

Mais je sais pas, j'ai trouvé ça moins aboutit. Même ton humour, dont je me délecte habituellement, m'a semblé inégal. J'étais mort de rire à certains moments (le dialogue de séduction m'a beaucoup plus, comme à Cyb) et j'ai à peine sourit à d'autres. Un sentiment de haut et de bas que je ne ressent pas d'habitude sur tes textes.

Même chose pour les dialogues, certains sont formidables, d'autres beaucoup moins excitants. Y a pas vraiment de magie dans ce texte, ce petit truc qui me fait habituellement frémir, exploser plein d'images dans la tête.

La fin ne m'a pas déplu. C'est peut être mon côté fleur bleue mais j'ai pas trouvé ça excessivement dégoulinant de sentimentalisme.

Y a peut être un peu trop de clichés au centimètres carrés aussi. Même s'ils sont agréables. (la deuxième chance pour faire le bien, la boucle temporelle dont il faut trouver la sortie, l'histoire d'amour...) bref.

Alors comme c'est du Tchollos, ça reste très bien écrit, rythmé, les images sont percutantes, vivantes, j'étais dans la tour au milieu de tous ces couillons, je sentais la sueur et la testostérone... Mais pour moi c'est du Tchollos qui peut mieux faire.

Parait que de 14 à 16 c'est très bon. Pour moi, au vu de ton talent, ce texte est juste bon.

Mais je salue la diversité des textes que tu nous proposes, et n'en attend pas moins impatiemment ta prochaine histoire !

Merci Tchollos :)

Ninj'

   Pat   
11/10/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup
On entre progressivement dans l'histoire qui recèle bien des surprises au fur et à mesure de la montée... J'aime beaucoup l'humour fin et percutant... plein de références... Très enlevé ce texte ! Quant au style : super.... Vraiment très bien écrit. Enfin, un style qui me plait en toute subjectivité.... En fait c'est surtout l'écriture qui m'a plu.
Je pense, en fait, que la fin n'était pas forcément utile (le passage avec le père), mais peut-être était-ce pour "boucler la boucle" ? J'aime beaucoup ces histoire de retour vers le passé avec les changements que cela implique, même si c'est pas nouveau... mais je ne m'en lasse pas. je suis aussi très sensible aux personnages un peu loosers qui, malgré tout, ne se prennent pas au sérieux et chez lesquels on devine quelque chose qui n'est pas encore exprimé... Ca se sent dans l'autodérision et aussi dans la drague subtile qui cache une certaine tendresse... Un personnage attachant, comme je les aime !

   nico84   
9/11/2007
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
J'ai bien aimé ton humour, ton histoire belleet qui nous rapelle que si nous allions un tant soit peu vers les autres, on pourrait faire beaucpoup de bonnes choses.

J'adore !

   widjet   
8/2/2008
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonsoir

Fluidité, humour décalé et romance pour cette histoire originale qui m'a fait penser à UN JOUR SANS FIN, la délicieuse comédie d'Harold Ramis.

Quelques moments assez savoureux (la drague) et toujours ce petit côté "pince-sans-rire" assez british (qu'on retrouve dans certains passages) dont je suis particulièrement friand.

Un bon moment de lecture et un plaisir d'écriture de l'auteur qui est vraiment palpable.

Merci beaucoup

W

   Anonyme   
12/6/2008
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J' ai lu ce texte ce matin et ce fut une bonne tranche de rire. Je n' avais plus de pain ni de confiture, mais grâce à toi, j' ai eu ça servi sur un plateau
Eu égard à ma relative inculture litteraire, je ne saurais le commenter aussi sérieusement que les agrégés qui ont déja tout compris. J' avoue cependant qu' ils m' ont aidé à mettre des mots sur l' analyse experte qu' il ont fait de ce récit.
Moi, je marche surtout aux zygo, et je peux dire que je me suis poilée.
je marche aussi à taton, et je reconnais là de la très bonne litterature.

   Anonyme   
29/6/2008
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Alors pour commencer, et parce que ça m'a bien fait rire, se cogner la tête dans une clinche est quelque chose qu'on fait rarement, sauf, bien entendu si on essaie de passer sous le manteau d'un Chippendale!
Clinche en argot estellien a un tout autre sens (bien plus Xraté et phallique) que clenche (qui est ce petit truc grace auquel on ferme la porte, même si le terme clinche est usité version Belgicisme pour qualifier la clenche... lol)...

Ensuite, et bien je me retrouve dans un jour sans fin, dans l'antre de la folie, dans un piège duquel on ne ressort que lorsqu'on arriver à percer le mystère... presqu'une version moderne de l'énigme de la porte des enfers...

superbe moment de détente, superbement raconté, même si on sent la chute à plein nez...

   marogne   
26/10/2008
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je suis rarement sensible à l'humour, et ici, sans doute malheureusement, je ne peux pas dire que le texte m'ait fait sourire. J'en apprécie néanmoins le coté un peu "british" déja relevé par d'autres commentateurs. J'ai apprécié la construction, même si je me suis un peu lassé des répétitions (je n'avais pas vraiment accroché au film non plus...).

Du métier quant au style et au vocabulaire, indéniable.

L'idée développée, et qui est reprise dans le titre, me parait per contre tout à fait intéressante, et la façon dont elle a été illustrée une très bonne idée.

   Anonyme   
21/2/2009
J'ai éclaté de rire derrière mon écran... comment dire ? A étapes régulières.
Mes zygomatiques te remercient pour cette cure de jouissance.

J'ai cru un moment que tu allais m'entraîner dans cet "Anneau de Moebius" dont je viens de terminer la lecture et que je vante aux Oniriens... au cas où tu veuilles les coordonnées c'est dans le Forum. (et il ne s'agit pas que de voyages dans le temps, c'est vachement plus vicieux...)

J'adore Oslowsky, il est... farfadesque et bien sympathique.

La fin de cette nouvelle, j'arrête pas de la relire parce qu'elle me gêne un peu.
Elle détonne, elle est "plate" au premier abord. Après longue réflexion, elle l'est moins.
Ton héros sait désormais qui il est et ce qu'il a "dedans lui" et c'est dommage qu'il n'en fasse pas part à son père. Mais l'amour filial prime.
J'ai passé un excellent moment.

   jaimme   
1/11/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
La fin, l'histoire d'amour m'a réconcilié avec la nouvelle. En effet autant j'ai bien ri jusqu'à la moitié (je ne sais plus quel étage...) autant après je me suis essoufflé (va savoir, l'âge, ma cigarette, les courgettes...). Et puis la rencontre, le petit dialogue très mignon. J'ai trouvé qu'à certains moments le fond humoristique tournait au potache. Je sais qu'il est difficile de tenir la longueur (surtout sur autant d'étages, mais la facilité s'est installée par moments.
Bon, ce fut quand même un agréable moment de lecture.


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