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Policier/Noir/Thriller
TITEFEE : Le village aux sept péchés - suite 6
 Publié le 16/08/07  -  3 commentaires  -  11375 caractères  -  15 lectures    Autres textes du même auteur

Les personnages se précisent... mais l'histoire est encore entourée de mystère.


Le village aux sept péchés - suite 6


MARGUERITE GAUCHER


Voilà plus d’une semaine maintenant que Coraline a disparu.


Dès le lendemain de la déposition, le directeur de la DDASS, accompagné d’une psychologue, était venu avec les gendarmes, rendre visite à la ferme.


Marguerite Gaucher, d’habitude très loquace, avait adopté très vite un silence têtu et inusité. Il lui avait semblé ressentir étrangement une sorte de réprobation dans le feu nourri des questions. Celles-ci avaient surtout porté sur sa manière d’élever Coraline et singulièrement sur sa façon de concilier la tâche de famille d’accueil qu’on lui avait confiée et ses deux autres activités, qui lui prenaient le plus clair de son temps.


Et depuis, la nuit, elle ressassait toutes les impressions désagréables de ces interrogatoires, comme si quelque part on la jugeait coupable d’une fuite de la toute jeune adolescente !


Et pourtant, Dieu sait qu’elle l’aimait cette petite Coraline ! Elle ressentait même à certains égards une bouffée d’orgueil d’avoir, malgré ses nombreuses activités, élevé cette petite fille et obtenu d’elle de grandes manifestations de tendresse.


Bien qu’elle se soit sentie infiniment flattée par l’appellation tendre, dès les débuts de leur relation, Marguerite avait dû demander à Coraline de ne pas l’appeler maman, mais Mam’margot. Cependant elle n’avait jamais refusé les élans affectueux de Coraline qui recherchait souvent l’abri de ses bras pour quémander un câlin.


*

* *


Marguerite se souvenait encore avec émotion de l’arrivée de ce petit bout d’enfant un jour de décembre.


La neige avait ce jour-là recouvert la campagne et un vent aigre vous coupait le souffle. Les tilleuls de l’allée étaient comme cristallisés et scintillaient sous un soleil pâle et rosissant.


Marguerite avait aperçu de loin, s’engager dans le chemin, la voiture blanche de la DDASS. Elle zigzaguait pour éviter les plaques de verglas qui s’étaient formées dans les trous humides du chemin mal empierré et souvent mis à mal par le passage des bêtes.


L’éducatrice qui suivrait régulièrement la petite fille, descendit de la voiture la première, suivie peu après par le directeur qui avait conduit depuis Châteauroux et venait de trouver un abri sous l’appentis pour la voiture…


Pelotonnée dans une douce chaleur, à l’intérieur de l’habitacle,Coraline continuait à dormir.


Le claquement sec de la portière l’éveilla en sursaut. Elle regarda autour d’elle mi-apeurée, et mi-curieuse, prit son pouce dans la bouche et se roula en boule sous la couverture qu’on avait glissée sur elle pendant le voyage.


- Allez mademoiselle Coraline, debout, tu es arrivée, dit le directeur en allant après sortir du coffre une grosse valise grise qui contenait sans doute les effets de l’enfant


L’éducatrice saisit la main de la fillette et emmitoufla la petite Coraline dans la couverture que la gamine n’avait pas quittée. Elle la drapa autour de ses épaules pour qu’elle ne sente pas trop vite la morsure du froid.


La fillette fit son entrée ainsi : emmitouflée dans un plaid à carreaux, le visage encore un peu bouffi par le sommeil, son pouce dans la bouche et l’autre main retenant les pans de la couverture serrant très fort la main de Mademoiselle Serrat son éducatrice... Elle tenait cette main chaude, solidement crispée dans la sienne et resserrait sa pression à chaque velléité de la jeune éducatrice de se séparer d’elle.


Elle fit rapidement le tour de la grande pièce de ses yeux en amande couleur cachou mais demeurait figée à la place où on l’avait conduite.


Marguerite l’avait alors débarrassée de sa couverture qu’elle avait posée sur le dossier d’une chaise mais Coraline n’avait jeté qu’un regard rapide à celle qui allait prendre le relais dans son éducation…


Elle était devenue méfiante depuis le dernier séjour qu’elle avait passé pendant quelques mois, qui lui avaient semblé une éternité, dans une famille qui manquait de chaleur et de psychologie et gardait, plus qu’élevait, trois autres enfants de la DDASS réputés difficiles et bien plus âgés que la petite fille.


On n’avait pas compris pourquoi l’enfant s’était renfermée sur elle-même et se réfugiait souvent dans le grenier où là elle s’inventait des histoires pour lesquelles elle avait développé un grand pouvoir imaginaire...


Mais devant les premières crises d’asthme et les cystites à répétition de Coraline, on préféra la changer de lieu et de climat, prétextant que les bords de l’Indre étaient trop humides pour la petite fille qui enchaînait angines, bronchites et otites les unes derrière les autres et étouffait tous les soirs dans son petit lit. Sa respiration sifflante lui donnait l’impression qu’elle allait mourir étouffée, toute seule, la nuit, en haut dans sa chambre sans que personne ne vienne s’enquérir de son état et la rassurer.


Elle demeurait souvent, des nuits durant, d’interminables heures, assise dans son lit, dans le noir, la fenêtre grande ouverte sur un ciel qu’elle regardait avec des yeux émerveillés lorsqu’une étoile filante griffait fugacement le firmament…


La seule personne qui lui avait porté quelque intérêt jusqu’à présent était Caroline Serrat, son éducatrice. La presque similitude de leurs deux prénoms et l’intérêt non feint de Caroline, avaient fortement attaché la fillette à la jeune fille encore peu aguerrie à la misère et aux problèmes de placement des enfants orphelins.


Coraline restait donc collée à la jupe de l’éducatrice comme si elle ne voulait pas qu’on l’en sépare.


*

* *


Un grand feu brûlait et crépitait, dans la cheminée et dans un coin, le sapin de noël pas encore garni, avait déjà pris place car dans une quinzaine de jours ce serait la grande fête. Les deux familles seraient réunies autour de la grande table de ferme pour le réveillon, mais il y aurait une autre convive : une petite fille nommée Coraline que tout le monde attendait maintenant.


Une de ses photos était déjà en bonne place sur le manteau de la cheminée et un cœur rouge sur lequel était brodé « bienvenue Coraline » était épinglé à une chaise. Marguerite débarrassa l’enfant de son manteau, lui enleva ses chaussures de ville trempées par la neige, et la conduisit à sa chambre


La chambre de la fillette était prête depuis quelques jours déjà. C’était une pièce donnant sur le petit pré et la mare aux canards. Elle était peinte en blanc avec des rideaux bleus et une courtepointe en satin, bleue elle aussi, et sur le lit, une poupée de chiffon avec de grandes jambes et des cheveux de laine torsadés d’une belle couleur bleu foncé que la maman de Marguerite avait confectionnée pour Coraline comme elle avait fabriqué avec amour des poupées semblables à Marguerite lorsqu’elle était petite.


Marguerite se souvenait de ces « princesses » qui lui servaient de confidentes et contre lesquelles elle s’endormait, la tête posée sur leur corps bourré de vieux chiffons avec autour du cou les deux grands bras de la poupée molle et douce.


Le visage de la petite Coraline s’éclaira pour la première fois depuis son entrée, par un lumineux sourire, mais elle n’osait encore saisir cette poupée qui lui souriait elle aussi de ses lèvres peintes en rouge carmin et ses yeux brodés de noir… La maman avait taillé le corps dans une soie couleur marron glacé du plus bel effet.


Marguerite lui mit d’office la poupée dans les bras, lui nouant doucement autour du cou les grands bras moelleux de la poupée et, peu après, elles redescendirent dans la pièce principale. Marguerite fit asseoir Coraline à ce qui serait désormais sa place à cette table. Elle partit aussitôt préparer le chocolat chaud et sortir la confiture de myrtille qu’elle avait prévue pour la circonstance.


Dans son coin, l’air souriant et ravi de voir arriver une compagne de jeu, le fils de la maison finissait de remplir une page de chiffres écrits dans un cahier un peu écorné…


Il lui tardait d’aller vite jouer à sa Playstation mais il avait d’abord à s’acquitter de sa corvée d’écriture et de calculs rapides… Le cours élémentaire lui paraissait déjà ardu !!!


Son père, ancien instituteur, y veillait personnellement et le soir éclataient souvent des discussions un peu vives entre l’enfant et Gilles qui tempêtait sur son rejeton. Ce gamin déjà grand pour son âge était doté d’une imagination débordante mais apportait peu de soins et de concentration dans les travaux de classe… il fallait toujours le maugréer et le reprendre. Le punir d’ailleurs ne faisait rien à la chose, car Pierre oubliait très vite et s’amusait d’un rien. Un oiseau qui volait, une gomme flanquée de quatre punaises, déguisée en voiture, l’emmenaient à des années lumière et il finissait par oublier la voix de celui ou celle dont le sujet n’arrivait pas à le captiver.


Marguerite revoyait en quelques instants la reprise des classes après les vacances de Noël. Elle avait accompagné Coraline pour la présenter à l’instituteur.


Pierre, lui, avait filé sitôt la dernière tartine, avalée pour rejoindre son copain qui l’attendait comme toujours près de la fontaine dans laquelle ils y faisaient nager toute une armada de bateaux taillés dans l’écorce des pins. Il n’était pas rare qu’ils regagnent la salle de classe les avant-bras de leur pull ou chemise trempés car ils oubliaient près de cet « océan mythique » l’heure et surtout la précaution de remonter leurs manches ; Les petits esquifs étaient dissimulés dans une grande boîte de biscuits Lu que l’épicière leur gardait jusqu’aux prochains appareillages pour des guerres navales aux stratégies dignes d’un amiral…


Deux jours après sa rentrée en cours préparatoire, l’instituteur vint voir les Gaucher et attablé devant une tasse de café, ils discutèrent de l’incroyable facilité de la fillette qui savait déjà lire, compter et avait un vocabulaire surprenant pour son âge. Gilles n’était pas d’accord avec son collègue pour la faire monter de section, prétextant qu’elle n’avait peut-être pas la maturité pour suivre, mais l’instituteur tint bon, avançant comme argument que, de toute façon, dans une classe à sections multiples, ce seraient toujours les enfants qui règleraient d’eux-mêmes leur progression et donc que s’il voyait que Coraline s’ennuyait dans sa section il la laisserait faire les devoirs des autres sections… D’ailleurs, lui-même avait été un enfant doué, qui s’était fort ennuyé à l’école jusqu’à ce qu’une institutrice comprenne qu’il fallait faire confiance à l’intelligence et l’adaptation du petit garçon afin que celui-ci s’intègre tout à fait. En effet, il faisait office de paresseux, alors qu’il comprenait tout, mais était cantonné dans des exercices qui l’ennuyaient prodigieusement.


Coraline put alors suivre les cours comme elle le voulait et obtenait même des notes au-dessus de la moyenne en certaines matières d’éveil des grandes sections… les structures scolaires étant encore très compartimentées, l’instituteur l’inscrivit d’office en cours élémentaire première année, et le dernier trimestre elle pouvait très bien suivre la classe supérieure sans y être inscrite.


Studieuse même à la maison, elle finit par tirer vers le haut Pierre qui ne voulait pas paraître idiot devant une fille et surtout devant son père qui n’aurait pas manqué de lui servir des remarques blessantes pour son petit orgueil déjà si machiste…



 
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   macada   
17/8/2007
tres bon. sentiments bien rendus.

   Maëlle   
9/12/2007
Le portrait "en creux" de Coraline est plutôt bien rendu.

   xuanvincent   
25/9/2008
 a aimé ce texte 
Bien ↑
L'intrigue se concentre dans cet épisode sur le portrait, qui m'a paru réussi, de Coraline Gaucher, la fillette disparue.


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