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Poésie néo-classique
luciole : Le poète lunaire
 Publié le 11/07/17  -  20 commentaires  -  1711 caractères  -  407 lectures    Autres textes du même auteur

Je vais m’exercer seul à ma fantasque escrime,
Flairant dans tous les coins les hasards de la rime,
Trébuchant sur les mots comme sur les pavés,
Heurtant parfois des vers depuis longtemps rêvés.

Baudelaire


Le poète lunaire



Après qu’il eut dîné d’un excellent poulet
Qu’ornaient artistement deux brins de serpolet
Et vidé sans façon une bonne bouteille,
Voyant dans chaque grain de sable une merveille
Et sentant dans son cœur puissamment exalté
Battre de l’univers l’ineffable beauté,
Le poète voulut faire une promenade.
(Sans doute de beaux vers lui viendraient en cascade.)
Le vent léger du soir, tout parfumé de thym,
Caressait les cyprès, guetteurs de son jardin ;
L’air frémissait du vol soyeux des pipistrelles ;
Cigales et grillons agitaient leurs crécelles ;
Toujours fidèle à son nocturne rendez-vous
– Caravelle glissant sur le ciel noir cachou –
La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse
Et, lentement, au toit de sa blanche maison
S’amarrait. Ses rayons dansants sur le gazon
Traçaient des runes comme à l’encre sympathique.
Tandis que, nez en l’air, il voyait, drolatique,
Cet obus que Méliès planta dans son œil droit,
Une inspiration – incomparable exploit –
Traversa son cerveau d’ordinaire bien vide :
Il allait composer un poème splendide
Qu’enrichirait l’habit d’or de l’alexandrin !
Mais soudain, dans un nid-de-poule du chemin,
Son pied se prit. C’était la foulure imbécile !
Lors, regagnant d’un pas comique et malhabile
Sa demeure – pestant, jurant abondamment –
Il fit, main sur le cœur, l’infrangible serment
De ne plus se mêler de pareilles broutilles,
D’oublier l’hiatus, les rimes, les… chevilles.

Tout penaud, le poète, ayant dit, n’eut plus qu’à
Étendre sur la sienne une noix d’arnica…


 
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   Curwwod   
22/6/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Chouette, une poésie signifiante (ça se fait rare par les temps qui courent) où le respect scrupuleux des règles de la poésie traditionnelle ne contrarie en rien un vrai souffle poétique qui s'appuie sur de très jolies images, orchestré par un rythme harmonieux, une subtile ironie et une fantaisie, ma foi, bien réjouissante. C'est donc un poème techniquement et poétiquement réussi. J'ai beaucoup aimé l'allusion à Méliès, (encore que la lune ne soit pas trop bien en cour ces temps-ci) qui enrichit votre poème. On vous chicanera sans doute quelque bancalité dans un vers ou deux, des phrases un peu longues, mais cela ne gâche en rien le plaisir que j'ai eu à vous lire.
"Caravelle glissant sur le ciel noir cachou-
La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse " c'est vraiment bien joli...

   Miguel   
28/6/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une versification magistrale (quel dommage que cette rime "rendez-vous/cachou" nous prive de la section classique), un ton vif et un rythme enlevé qui conviennent parfaitement à cette pièce humoristique L'univers créé par les images et les sonorités semble nous entourer ; on s'y croirait. Il n'y a qu'à la fin que de personnage on devient volontiers spectateur pour rire (avec un peu d'autodérision quand même) des mésaventures de ce cher poète.

   Anonyme   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Poème très bien écrit, amusant, avec un vocabulaire soigné et des images originales ! On sent qu'il y a tout un travail derrière ces quelques vers classiques... Et le poète rit de lui-même evec esprit...

J'aime beaucoup, par exemple :
" Toujours fidèle à son nocturne rendez-vous
– Caravelle glissant sur le ciel noir cachou –
La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse "

Ou ces 2 vers très drôles :
"Une inspiration – incomparable exploit –
Traversa son cerveau d’ordinaire bien vide "

   Anonyme   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Une fort belle écriture pour cette poésie aux images élégantes et légères auxquelles vient se joindre un humour malicieux.
" Une inspiration – incomparable exploit –
Traversa son cerveau d’ordinaire bien vide "
" Tandis que, nez en l’air, il voyait, drolatique,
Cet obus que Méliès planta dans son œil droit "

j'ai beaucoup aimé cette lecture.

   Recanatese   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Luciole,

un texte très joliment écrit, comme à votre habitude. Des trouvailles à la pelle, des variations dans la syntaxe, des enjambements judicieux qui donnent un rythme fort agréable au poème.
On rit de ce personnage à la fois grotesque et attachant car je pense que de nombreux apprentis poètes, dont je fais partie, peuvent se reconnaître en lui.

"La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueils d'une étoile traîtresse"

Ces deux vers sont très poétiques et se mêlent avec bonheur au ton général du texte.

Bref, j'ai beaucoup aimé et espère vous relire bientôt

   MissNeko   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un bien agreable poeme où se mêlent un côté classique ( le poète rêveur qui sort chercher l inspiration sous la lune ) et un côté humoristique ( la cheville foulée !).
Le poeme classique rêveur un peu à la manière de Rimbaud se transforme en poète maladroit et distrait.
Adieu alexandrins, vers et rimes bonjour arnica !
C est bien écrit Comme à l habitude de l auteur.
J ai aimé particulièrement :

"La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse " magnifique

A vous relire

   Anonyme   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonsoir luciole... J'ai toujours su que hiatus, rimes et chevilles étaient de faux amis, limite dangereux, la preuve !

Tout a été dit ou presque et j'ai également apprécié ce poème à sa juste valeur avec un petit regret quant à l'avant-dernier vers un peu tarabiscoté à mon goût... mais la rime qu'à/arnica compense largement ce léger désagrément.
Comme d'autres avant moi, mention spéciale à ces deux vers :

La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse

Bravo et merci pour ce texte qui ne manque pas d'humour...

   Cristale   
11/7/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
J'adore ! C'est jouissif à souhait :)
Je ne relèverai rien, je ne ferai pas de critique, pas de chipotage non plus parce que ce texte me plaît dans son ensemble et qu'il m'a rendu le sourire...
Le genre de poème auquel j'attribuerais le premier prix lors d'un concours onirien.
Bravo Luciole !

   Arielle   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je savais bien que la quête de l'alexandrin parfait était un sport dangereux ! Ce pauvre poète chevillé à ses rimes vient de nous en fournir une douloureuse démonstration.
Mais quelle élégance, quel humour pour couronner la chute de ce beau voyage lunaire qui ne revendique pas pour rien la fantaisie débridée de Méliès ! Rien de pesant ni de compassé dans ces vers qui se tortillent avec une aisance remarquable. Du grand art !

   Cox   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Hihi, j'ai bien aimé, moi aussi.

Je n'apprécie pas beaucoup les gens qui se disent poètes -qui se clament poètes, qui se gargarisent poètes. Ces grands esprits qui vous regardent du haut des sphères inaccessible de leur Art à la majuscule souvent autoproclamée... Ils m'agacent.

Alors, tout ce qui peut faire dégonfler ces hautes sphères dans le pet grotesque du ballon de baudruche qui exhale, ça me plaît. J'avoue que voir un poète trébucher sur les reliefs de notre bas monde me procure un certain plaisir. Plaisir mesquin, certes, mais on n'a pas tous la grandeur d'âme des Apollons.

Oh, ce brave petit poète là n'avait rien de bien désagréable. Il n'avait pas l'air de se donner de ces grands airs. Il est bien sympathique au contraire. Mais sa petite histoire qui le pousse à se mettre de l'arnica à la cheville et à la rime est une jolie langue tirée aux Grands Esprits rongés de vers.

Merci pour ce texte !

   Anonyme   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Luciole,
Bravo et merci pour cette merveille. Une histoire drôle et tellement bien écrite, des trouvailles, des références, des images inoubliables qui marquent l'esprit.
Que demander de plus à un auteur quand est ainsi offerte sur un plateau d'argent une si belle poésie !

   Pouet   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bjr,

Ah ma chère Luciole, je vous retrouve mutine et un rien ironique, quel délice que de lire vos vers ainsi tressés.

Du poulet au serpolet en passant par le cachou pour finir avec l'arnica, ma lecture fut un délice.

Je me souviens de votre présentation de 2016, en ce premier janvier béni où vous découvrîtes Oniris... Vous nous disiez alors, emplie de candeur, n'avoir jamais écrit tout en étant désireuse d'apprendre. Que de chemin parcouru, quel talent, quelle maestria! J'en suis presque ému... Une Reine. Vous êtes une Reine.

Je vous tire très humblement mon chapeau de paille chère amie à vous qui, toujours d'après ce forum de présentation, avez le même âge que moi. Vous n'écrivez que depuis un an et demi... Voyez le résultat! Je scribouille en dilettante depuis une vingtaine d'années et je ne me hisse même pas à la moitié de votre insigne cheville, cheville que j'imagine fort douce, mais pardon je m'égare... C'est l'émotion.

Admirativement vôtre.

   leni   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
une fantaisie soignée parfois drôle qui est une agréable lecture

Une inspiration – incomparable exploit –
Traversa son cerveau d’ordinaire bien vide :
Il allait composer un poème splendide
Qu’enrichirait l’habit d’or de l’alexandrin !


quelle aisance dans la façon de dire
J'ai beaucoup aimé
Salut cordial LENI

   Anonyme   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

Une fantaisie très plaisante à suivre, où l'auteur reprend gaiment à son compte l'idée exprimée gravement dans les vers placés en épigraphe.
Si l'auteur avouait un penchant pour la délicate poésie de Tristan Derème, délicieux rimeur si injustement oublié aujourd'hui, je n'en serais pas surpris.

Je remarque d'emblée le goût de l'auteur pour le trimètre, lu à trois reprises au moins :

"L’air frémissait du vol soyeux des pipistrelles ;"
"Toujours fidèle à son nocturne rendez-vous"
"Traçaient des runes comme à l’encre sympathique."

Des passages d'une véritable grâce marqués par de forts beaux vers :
"L’air frémissait du vol soyeux des pipistrelles ;"

...et bien entendu celui-ci :

"– Caravelle glissant sur le ciel noir cachou –
La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d’une étoile traîtresse
Et, lentement, au toit de sa blanche maison
S’amarrait." ;

... tentation du lyrisme tempérée par l'humour et le second degré de l'ensemble de cette adroite pièce de vers, jusqu'à la chute spirituelle.

Il y a, peut-être, un ou deux vers dont le balancement rythmique pourrait être sujet à débat ("Qu’enrichirait l’habit d’or de l’alexandrin !") mais rien ne gâche le plaisir du lecteur.

Sans flagornerie, mille bravos, luciole !

A.

   papipoete   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour luciole,
Un poème aux accents nostalgiques au début, et se développant, prend des ailes et se joue des pieds et des rimes, sans pourtant fauter !
NB l'exercice semble facile tant la lecture est aisée et entraînante, mais vous dûtes échauffer vos nobles neurones pour parvenir à cette perfection ! La fin est très originale et les rimes " n'eut plus /qu'à " et " noix d'arni/ca " bien trouvées !

   LenineBosquet   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,
du très bon Luciole, il y a tout ici, le vocabulaire riche et soigné, le thème original et son traitement drôle et légèrement ironique quoique empli de tendresse, la prosodie impeccable... bref, merci, j'en veux encore.

   Ioledane   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
L'humour et la dérision mêlés artistement à quelques images très poétiques, le tout en excellents alexandrins (et quelques trimètres) maniés de main de maître : voilà pour ce qui me concerne un vrai plaisir de lecture.
"Caravelle glissant sur le ciel noir cachou", il fallait y penser ...
Mais surtout, ce jeu sur la cheville du poète et celle du poème - excellent.
Et la rime finale, jubilatoire !
Bravo.

   archibald   
12/7/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un texte fluide et élégant parsemé de petites trouvailles drolatiques, c’est gentiment cruel, tout pour (me) plaire.
Le poète lunaire, c’est toi, c’est moi… d’autres ne se retrouveront pas dans cette auto-dérision. Tant pis pour eux.

   jfmoods   
15/7/2017
Le poème est composé d'une strophe de 32 vers et d'un distique en alexandrins, à rimes suivies, pauvres, suffisantes et riches, alternativement masculines et féminines.

Le titre ("Le poète lunaire") et le troisième vers baudelairien de l'entête ("Trébuchant sur les mots comme sur les pavés") préparent le développement et la chute du poème.

Le texte repose sur un violent effet de contraste entre sublime et grotesque. C'est la grande disproportion des parties qui assure la réussite du poème.

Au fil des 25 premiers vers, le sublime se déploie sans mesure. Rien ne semble devoir en freiner la vigoureuse progression.

Le repas, un chouia alcoolisé (vers 1 à 4) est un enchantement (groupes nominaux laudatifs : "un excellent poulet", "une bonne bouteille", adverbes : "artistement", déterminant indéfini : "chaque grain de sable").

La promenade digestive (vers 5 à 12), entamée sous de bons auspices (métonymie : "son coeur puissamment exalté", groupe nominal élargi à la construction inversée : "de l'univers l'ineffable beauté"), est portée par la grâce d'une nature complice (personnifications : " Le vent... / Caressait les cyprès, guetteurs de son jardin", prégnance des sens : "tout parfumé de thym", "L’air frémissait du vol soyeux des pipistrelles", "Cigales et grillons agitaient leurs crécelles").

Avec la levée des yeux vers le ciel (vers 13 à 21), l'évocation se pare d'une dimension merveilleuse (assimilation de la lune à un bateau céleste : "caravelle", "coque", "périlleux écueil", rejet : "au toit de sa blanche maison / S’amarrait", personnification : "Ses rayons dansants sur le gazon / Traçaient des runes comme à l’encre sympathique", support cinématographique : "Cet obus que Méliès planta dans son œil droit").

Les vers 22 à 25 traduisent la montée progressive de l'exaltation poétique (diérèse : "inspiration", passé simple marquant une fulgurance : "Traversa son cerveau", groupe nominal laudatif : "un poème splendide", métaphore soulignant l'éminence : "l'habit d'or de l'alexandrin").

Patatras ! En 9 petits vers, tout ce bel édifice s'écroule. Les ailes soudainement coupées, le poète s'effondre pesamment, stupidement, dans le quotidien le plus terre-à-terre (rime significative : "la foulure imbécile", "un pas comique et malhabile", niveau de langue relâché : "pestant, jurant abondamment", assimilation des sens figuré et propre : "les... chevilles", "la sienne").

Merci pour ce partage !

   Sebrutus   
18/7/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément
Magnifique ! Quand j'ai lu :

"La lune soustrayait sa coque avec adresse
Au périlleux écueil d'une étoile traitresse"

J'ai failli tomber de ma chaise. C'est juste beau.

Merci pour cette composition!


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