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Poésie libre
Pouet : Interstices
 Publié le 15/09/25  -  8 commentaires  -  1191 caractères  -  194 lectures    Autres textes du même auteur


Interstices



Vivre en travers des autres,
tout juste un petit peu,
le voyage dans nos têtes d'ailleurs.

Ne plus se reconnaître pour se voir,
le piège est autour.
Et en nous.

Imposture permanente dans les actes sociaux que la vie nous oblige,
en soi-même hors de soi dans la pensée peuplée d'envols inachevés.

Se soustraire au monde,
être la coquille ;
les angles de l'ego prennent la place impartie
dans cette ligne de vide.

L'enfant peut-il sonder l'obscurité prégnante,
l'âme désamorcée ?

Et se faire héritage.

Pouvoir distinguer sans ne jamais savoir les contours de son je.
Des rendez-vous fugaces, cette véracité futile et éternelle.
Les pleurs sont falsifiés.

Alors polir l'acte mais en étant absent,
demeurer dans le faire,
dans la mécanique du rien,
du répétitif, du rassurant.

Simplement pour ces yeux de candeur,
ce sourire bouton d'or
ces intentions
sans intention.

Aimer sans arguments.


___________________________________
Texte avec un mot changé avant publication


 
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   Volontaire   
15/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,

Poème tout en puissance et en fragilité. "Vivre en travers des autres / tout juste un petit peu, / le monde dans nos tête d'ailleurs." : ouverture touchante, joliment rythmée. "tout juste un petit peu" sonne comme une prière, une excuse murmurée : encore quelques secondes, quelques secondes à échapper à soi, ce soi contraint par la vie à se perdre dans les autres, à se fuir dans la pensée, et dans la fuite même se trouver ?
De belles images, évidentes, dans les dernières strophes ("polir l'acte", "la mécanique du rien, du répétitif, du rassurant", "ce sourire bouton d'or" où l'on trouve la lumière d'un sourire spontané, peut-être d'enfant, peut-être d'amant-e).
Au terme de la divagation existentielle, la conclusion qui tombe comme un couperet : "Aimer sans arguments". (S'agit-il des arguments de la philosophie hantant le poème ?) En tout cas l'amour gratuit, absurde comme recours aux pièges d'une vie contraignante, à la vacuité d'un quotidien dont il est préférable de s'absenter. Le poète prend tous ses œufs et les mets dans le panier d'un visage innocent.

La terminologie complexe (actes sociaux, véracité futile et éternelle, falsifiés), le rythme parfois heurté, les images très "philosophiques", peu détaillées (l'enfant, mais il est en salopette ? bien peigné ? myope ? et l'héritage, est-ce un juteux pactole, une dette, une maison, quelques gestes, des paroles ? et les angles de l'égo, ils gratouillent ou ils chatouillent ;) ?) me laissent un peu sur ma faim et me forcent à lire et relire ce poème pour le comprendre, sans être bien sûre d'y parvenir. D'où convenable* pour l'écriture (quoique cet unique point-virgule soit très élégant)

Merci pour ce partage :)

Bonne fin de journée

*J'avais évalué ce poème en EL un peu vite. Il est resté dans ma tête ensuite alors je profite de la parution pour changer le convenable/aime bien en aboutie/j'aime beaucoup (tout comme le monde est devenu le voyage :) )

   Provencao   
15/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pouet,

"Vivre en travers des autres,
tout juste un petit peu,
le voyage dans nos têtes d'ailleurs."

J'ai bien aimé ce vivre en travers des autres, qui prend forme par ce qu'on peut appeler l'inconstance, avec cette impression de vision supérieure qui s'offre là où l'on voit et qui devient ce que l'on perçoit, en découvrant le chemin, l'approche sinueuse et finaude des événements, des ressentis à travers ce monde de l'enfance, et en les offrant ainsi cristallins aux yeux de tout un chacun.

Au plaisir de vous lire,
Cordialement

   papipoete   
15/9/2025
bonjour Pouet
Vous re-voici donc en parution, et j'en suis heureux après bien des temps, où votre absence manqua !
Vous lire avec toute mon attention, celle d'un conteur non point comme ici, où nous partons dans le MOI des autres.
- je ne t'explique pas, tu ne comprendrais pas !
- mais...
- alors lis bien, et même entre les lignes !
Bon, papipoète s'y colle, mais ça ne prend pas bien dans sa tête.
Tout juste, à la fin vois-je un enfant qu'il faudrait considérer, comme un grand ?
NB j'aime les enfants, les petits qui croient aux histoires, le soir un livre d'aventure ouvert...sur une fée aux cheveux longs...tu voudrais que je te fasse une belle coiffure, avec des couettes ?
- je ne suis plus un bébé !
- oui, mais je voudrais te dire :
quand je te parle d'interstices que Poète Pouet écrit, tu comprends ?
- dis toujours !
" simplement pour ces yeux de candeur
ce sourire bouton d'or... "
Ah oui, ça c'est joli !
Bon, cher poète, vous aurez deviné que vos lignes me laissent coi ? mais je ne puis les savourer à leur juste valeur.
Il se trouvera, comme ce matin, des esprits affutés pour les apprécier, et vous en complimenter !

   Eskisse   
15/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pouet,

J'aime bien que le mot du titre n'apparaisse pas dans le corps du poème. Il faut chercher...
Interstices : ces petits espaces dans lesquels se glisser ou apparaître. Peut-être ce fin lieu où l'on parvient à être soi mais un lieu étroit...
J'ai trouvé la tonalité mélancolique, entretenue par ces infinitifs qui scandent le poème et par l'évocation de cette perte de soi infligée par la société. ( le masque de l' "imposture permanente" )

J'aime bien le rythme régulier de ce vers : ( 6/ 6/ 6/ 6/ 6)
"en soi-même hors de soi dans la pensée peuplée d'envols inachevés."
L'imposture prend de la place. On dirait qu'elle s'infiltre en chacun laissant l'homme-oiseau dans un entre-deux où il ne peut se réaliser. Il a perdu ses ailes. Il ne peut plus penser comme il veut.
La menace est donc intérieure. Une "imposture volontaire " comme la "servitude volontaire" de E. de La Boétie.

La disparition, l'effacement ( "se soustraire au monde" ) comme solution ? Solution qui semble écartée.
Il ne reste qu'à agir comme un automate , sans adhérer ( "en étant absent") à ce que l'on fait, mais POUR un enfant ( " ces yeux de candeur" / " ce sourire bouton d'or") . Il y a bien ici l'idée de transmission, peut-être pour que l'enfant puisse " se faire héritage" et transmettre à son tour.


" Aimer sans arguments" peut se comprendre comme aimer sans mots, sans justification, sans raison à donner. Puisque l'amour est de l'ordre de l'évidence, ou même inconditionnel entre parents et enfants.

   A2L9   
15/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Puisque le regard des autres fait boîter, ne vaut-il pas mieux ne rien voir et franchir les sommets qui nous attirent ? Mais les autres, il sont nous. Et à la sortie du moule, le gâteau n'est pas toujours industriel. N'est-ce pas ?
L'enfant ne veut plus être l'enfant semble-t-il, a-t-il peur de cette obscurité ?
Et j'ai cette intention de fleurir mon visage bouton d'or sans raison particulière, j'aime c'est tout.

Merci Pouet pour cette réflexion.

   Cyrill   
16/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Salut Pouet

En dépit de ses propres failles et de celles du monde, il semble exister une façon d’y exister qui passe par le regard sur l'enfance et la nécessité de sa présence auprès d'elle :
«pour ces yeux de candeur,
ce sourire bouton d'or».
Bien belle aventure que cet «Aimer sans arguments», même si à bien d’autres égards la souffrance morale et la difficulté à être justifierait d’abandonner la partie. La vie, quoi. Ou la non-vie quelquefois.
Un beau poème, réflexif, qui parle à mes régions enfouies, peu accessibles et parfois désespérantes.

   Louis   
19/9/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Dans ce poème, les verbes employés à l’infinitif indiquent que l’on se trouve face à un ensemble de consignes, de recommandations, de conseils éthiques sur la manière de conduire sa vie pour échapper à l’aliénation, celle qui empêche d’être soi-même ; ces instructions sont à l’usage du locuteur lui-même comme éventuellement à ses lecteurs.
En quelque sorte, le poème constitue l’esquisse d’un manuel de savoir-vivre en relation aux autres.

Première consigne :

« vivre en travers des autres »

Non pas vivre toujours "avec" les autres dans la recherche de communauté, d’union fusionnelle, d’entente ou d’association ; pas non plus suivre des chemins parallèles aux leurs, mais vivre « en travers ». Comme un obstacle qui obstrue ou limite le cours de la vie des autres ainsi que l’on dit d’une branche d’arbre qui empêche la circulation qu’elle « est couchée en travers de la route », où s’entend surtout l’entrave dans "en travers".
Cette recommandation consiste donc à contrarier les autres, à ne pas toujours leur complaire et ainsi se laisser happer par eux en réponse à leurs désirs et exigences ; elle consiste encore à entrer en résistance.
Non pas, pourtant, s’opposer aux autres en tout point, dans une attitude anti-sociale d’opposition systématique et radicale, mais contrarier « tout juste un petit peu » pour échapper à leur pression impérative, et s’affirmer soi, dans ses propres désirs ; et s’évader donc d’une certaine contrainte aliénante qui laisse libre cours à ses envolées : « le voyage dans nos têtes d’ailleurs ».
La vie avec les autres ne devient supportable, ne devient vivable qu’à ce prix.
L’acte de résistance se veut ici individuel et non collectif ; il ne s’agit pas de résister à un "système social", à un ordre social déterminé, mais à cette nécessité de la condition humaine qui est dans la vie de relation avec autrui.

La deuxième consigne est formulée de façon à constituer un apparent paradoxe :

« ne plus se reconnaître pour se voir »

Le paradoxe est pourtant levé si l’on comprend ainsi ce vers : ne plus se « reconnaître » dans les rôles sociaux que l’on joue, dans les identifications aux personnages de la mise en scène sociale, mais « se voir », se trouver, trouver l’identité plus authentique qui est la sienne au-delà ou en deçà du jeu social.
L’Identité pourtant ne peut être que fluente, et ne peut correspondre à celle, illusoire, d’une essence stable et invariable, elle exige donc que l’on échappe aux « pièges » tout « autour » de soi, qui la figent, l’immobilisent dans les rets sociaux qui ont été dressés, professionnels, familiaux ou autres.
Il s’agit donc de se voir avec ses propres yeux, et non dans les yeux des autres. Et non à travers le spectacle social.

Il faut donc échapper à « l’imposture permanente », c’est-à-dire à la simulation, à l’hypocrisie, à ces rôles auxquels nous sommes tenus dans les « actes sociaux », par des "obligations" ( « ce que la vie nous oblige »)
Dans « l’imposture », on passe pour un autre, on n’est pas soi-même, on est acteur, et non auteur de sa propre vie dans le grand théâtre du monde.

« se soustraire au monde,
être la coquille » :
Ainsi se formule un autre des conseils poético-éthiques du poème
Il faut, non pas porter une coquille, mais « être la coquille », se construire donc comme une armure, une paroi dure et résistante, une muraille protectrice, pour exister comme abri contre le monde, comme barrière infranchissable qui protège de son influence pernicieuse.

Il s’agit encore de « se soustraire au monde ». Ne plus s’y "engager", ne plus y "adhérer", mais au contraire s’en "détacher".
Si le monde est un théâtre trompeur, il ne faut plus rester sur scène, il faut trouver le moyen de s’établir ailleurs.
Mais il n’ y a pas de "hors-monde", pas d’ailleurs…
« La vraie vie est ailleurs » : aurait pourtant déclaré Rimbaud.
Mais l’ailleurs est ici, ou là-bas plus loin, mais non là-haut.

On ne peut donc « se soustraire » que dans une présence-absente :

« alors polir l’acte mais en étant absent
Demeurer dans le faire… »

Ne pas être entièrement présent à ce que l’on fait, n’être qu’un rouage
« dans la mécanique du rien,
Du répétitif, du rassurant »
Laisser ses actes devenir « mécaniques », se faire "automate", pour permettre à l’esprit désengagé d’acquérir plus de liberté.
La coïncidence avec soi est au prix d’une non-coïncidence avec ses actes sociaux.

Un souci de l’enfant surgit dans le poème de façon un peu abrupte et peu claire :

« L’enfant peut-il sonder l’obscurité ambiante
L’âme désamorcée ? »

La question semble rhétorique. L’enfant, en effet, pourrait-il adopter les consignes ici données, sans même avoir besoin de les lui donner ?
Il peut sonder « l’obscurité ambiante », non par la raison, mais par la sensibilité.
Parce qu’il peut avoir « l’âme désamorcée », il ne se laisse pas nécessairement prendre dans les filets des exigences du monde social.
Il peut aussi se rendre spontanément absent à ce qu’on lui impose ; lui aussi peut avoir le voyage dans une « tête d’ailleurs » ; lui aussi peut se faire coquille, et même "forteresse".

Pourrait-il « se faire héritage » questionne encore le poème.
Pourrait-il hériter dans le monde adulte de ce qui le caractérise comme enfant ?
Hériter de cette « candeur », de « ce sourire bouton d’or » évoqués dans la dernière strophe.
Au fond, c’est à se demander si l’enfant pourrait être le père ou la mère de ses parents pour leur transmettre sa « candeur », son innocence, sa sincérité, sa naïveté, son absence d’ « imposture », sinon par jeu, et sa façon de se rendre absent et se faire « coquille » quand il y a trop d’« obscurité ambiante ».

La dernière consigne est celle de l’amour :

« Aimer sans arguments »

Aimer dans l’humain la part de l’enfant ; aimer malgré tout la vie, aimer le réel et autrui. L’amour est affirmation positive du réel. L’amour est une joie ( mais pas toujours une pure joie)
Aimer aussi les « interstices » qui font le titre du poème, ces intervalles de vide où la pression sociale se fait moins forte, ces hiatus du monde, ces orifices dans les mailles du filet social, ces trous d’être où l’on échappe aux contraintes existentielles.

Aimer « sans arguments », c’est aimer sans raisons ; aimer le monde, c’est-à-dire l’affirmer sans nihilisme malgré son absurdité foncière, l’aimer dans la conscience lucide de la condition tragique de l’existence humaine. Cet amour ressemble fort à ce que Clément Rosset appelle très bien : « la force majeure ».


Merci Pouet

   Myndie   
20/9/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Pouet,

il y a effectivement comme un effet de vases communiquants entre ton poème et « Danse on a volcano » et je rejoins ici la pensée que tu as émise lors de ton commentaire. Sur certains points, poétiquement mis en valeur par de belles tournures, je retrouve les « impostures », les contraintes du paraître, l'obligation de se comporter, le regard qui blesse, le jugement qui condamne. J'y retrouve aussi les fêlures de l'enfance et la fuite salvatrice, quel que soit le moyen choisi. Ici aussi, il faut à tout prix « se soustraire au monde ».

Mais il y a également ce petit truc en plus qui préserve de la noirceur, ce soupçon d'innocence et de douceur :
« Simplement pour ces yeux de candeur,
ce sourire bouton d'or
ces intentions
sans intention.

Aimer sans arguments. »

Je trouve ça magnifique.
Ça me prouve qu'on peut aussi parfois s'affranchir de la mélancolie noire.

Merci pour ce beau poème.


Oniris Copyright © 2007-2025