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Poésie en prose
Psilosophia : L'Homme d'Argent
 Publié le 29/04/15  -  4 commentaires  -  4443 caractères  -  57 lectures    Autres textes du même auteur

L'Extase andine.


L'Homme d'Argent



L’Homme, à mi-distance entre ciel et terre, surplombait la ville du haut de la crête qui rougeoyait dans la lumière du couchant. Il grattait la poussière comme pour effacer la misère du monde, et en jetait des poignées au vent pour en célébrer sa grandeur. Il se contentait de ressentir le moindre atome de chaque grain qu’il empoignait, et la matière prenait vie entre ses mains abîmées, pendant qu’il entamait un chant mélancolique et éraillé pour ses Dieux.
La douce fragrance des orchidées sauvages colorait l’atmosphère, et les cactus géants semblaient tendre infiniment vers le ciel pour dépasser les gratte-ciel de la métropole un peu plus bas. Celle-ci ronflait et respirait dans un bruissement mécanique tout en étirant ses longues artères comme ferait la pieuvre perdue en plein désert. Les montagnes millénaires qui l’encerclaient la gardaient prisonnière contre leurs flancs rocailleux ; gardiennes accomplies et immuables, elles enlacent ainsi le béton pour qu’il ne coule point trop loin. Poison des champs et de la canopée, le béton dévorait tout, insatiable bête mugissante aux flancs poussiéreux. Son odeur était insoutenable, et venait troubler parfois de très brefs instants l'alchimie parfaite de ces parfums qui flattaient les narines de l'Homme installé haut sur la montagne.
Il fouilla sa besace pour en sortir un hochet tressé en osier pour accompagner ses chants de rythmes afin d’étoffer sa foi. Les cliquetis boisés de l’instrument brisèrent la fausse torpeur dans laquelle était plongée la nature environnante.
Celle-ci lui répondait en écho et s’imprimait du son de percussion, et bientôt ce dernier abandonna toute logique physique pour aller se déverser comme une vague dans chaque recoin des alentours. La vibration s’amplifiait et redonna cœur à l’Homme de reprendre ses refrains à plus vive voix encore. Il était ivre de sa mélodie, ivre de voir la nature répondre à ses chants.
Il se tenait maintenant debout devant le vide, le torse bombé vers le ciel, empli d’une douce énergie qui berçait son âme. Urkupiña, l’esprit des montagnes, sonnait les cloches des hauts sommets pour guider l’Homme dans ses psaumes. Les derniers instants de clarté offerts par le ciel furent l’apogée de sa ferveur, où il se sentit briller comme l’or sous le soleil des Andes.
L’intensité du soleil baissait de plus en plus, et il n’en restait désormais qu’un léger point orangé au halo doré qui caressait délicatement ses longs cheveux bruns et sa peau burinée. Les derniers nuages s’emmêlaient en haut des pics, formant d’immenses visages grimaçants ou souriants au fil des brises d’altitudes.
L’Homme s’endormit en toute quiétude, au moment où les premiers astres perçaient la voûte céleste avec toute la candeur du monde. Un immense condor se posa à quelques mètres du dormeur, les serres recourbées sur le bord du précipice et un œil sévère tourné en direction de la ville qui se parait de Mille lumières.
Au petit matin, il fut tiré de ses songes par la chaleur de l’aube qui se frotta langoureusement contre lui. Un fin filet d’air glissait lentement sur ses joues et les premiers oiseaux entamaient leur chant d’ouverture à gorge déployée.
La nuit lui parut très longue, et peuplée de rencontres aux accents oniriques. Son ventre qui gargouillait le rappelait à sa condition d’être mortel, mais il n’y prêta pas attention. L’éternel ronronnement de la cité n’avait pas cessé de la nuit, et redoubla d’intensité une fois le soleil sorti de sa cachette. Quelques faibles effluves urbains mortifères vinrent se mêler brièvement au parfum des végétaux et de la poussière. Un frisson lui parcourut l’échine, pendant qu’il préparait ses ustensiles de cuisine nécessaires à la préparation de la décoction de Liane d’Argent.
Il prit soin d’écraser les graines de Liane une à une avec un pilon en y mettant tout son amour, ajoutant petit à petit une eau qu’il avait recueillie au creux d’une souche d’un Faux-Poivrier dans une forêt à quelques kilomètres de là. Son geste était minutieusement calculé et comme empreint d’une volonté sacrée de lier son cœur à la plante qu’il cuisinait.
Le vent qui bruissait lorsqu’il s’était réveillé s’était tu, les feuilles ne murmuraient plus et un rare silence régnait sur la scène matinale. Seuls demeuraient le bruissement âcre en bas de la civilisation et de son pilon qui frappait délicatement contre le mortier d’argile...


 
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   Vincent   
5/4/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
La nuit lui parut très longue, et peuplée de rencontres aux accents oniriques. Son ventre qui gargouillait le rappelait à sa condition d’être mortel, mais il n’y prêta pas attention. L’éternel ronronnement de la cité n’avait pas cessé de la nuit, et redoubla d’intensité une fois le soleil sorti de sa cachette. Quelques faibles effluves urbaines mortifères vinrent se mêler brièvement au parfum des végétaux et de la poussière. Un frisson lui parcourut l’échine, pendant qu’il préparait ses ustensiles de cuisine nécessaires à la préparation de la décoction de Liane d’Argent.

et bien on n'a pas beaucoup le temps de reprendre son soufle

mais pourquoi en poésie libre,

je verrais plutôt votre texte en prose

j'ai eu l'impression de voir un film américain en cinémascope

avec beaucoup de belles images

j'ai beaucoup aimé

   Lariviere   
18/4/2015
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

Globalement, je trouve que votre texte est bien écrit. L'écriture est ample et maîtrisée, le vocabulaire est riche, les images impactantes, l'expression est aisée au service d'un style et d'une atmosphère qui se rapproche pour mes références personnelles, du réalisme-merveilleux. Sur le fond, la scène est d'ailleurs très explicite : c'est un rite chamanique qui fait le lien entre le réel moderne de la métropole et le merveilleux des "montagnes millénaires".

La poésie est présente, c'est certain, mais le rythme prégnant de l'ensemble et la construction très réaliste, très descriptive, ainsi que la progression narrative, me font plus penser à la scène (réussie sur le plan de l'écriture) d'une nouvelle, que d'un poème abouti. Il me semble que ce texte aurait mérité d'être plus débridé sur la forme comme sur le fond, pour délivrer toute l"intensité de son thème et de ses intentions poétiques. L'écriture de l'auteur et le choix du sujet s'y prêtent fortement.

En espérant que ce commentaire puisse aider l'auteur, je lui souhaite une bonne continuation !

   Anonyme   
29/4/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une prose plutôt inspirée !
L'ascète - ou anachorète - vit donc entre Ciel et Terre, plus proche de ses croyances, très certainement.
De belles images.
Très poétique.

   Anonyme   
30/4/2015
 a aimé ce texte 
Passionnément
Texte très bien écrit. 20 lectures à l'heure où je pose ce commentaire. Quel dommage ce si peu d'intérêt.
Beau texte, parce que j'y sens le travail, la relecture à voix haute (n'avez-vous pas trouvé le trop de verbes conjugués à l'imparfait ?).

Vous décrivez très bien ses moments où, d'un simple surcroît d'attention au naturel, l'on frôle des limites du mystique que seul l'esprit humain est apte à créer et percevoir, quand il décide de s'ouvrir et de laisser de côté le monde "raisonnable".

Vous me donnez envie de relire E. Dickinson...

Un seul avis stylistique, si je peux : faites des phrases plus courtes.

Merci de ce beau moment d'évasion.


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