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Poésie contemporaine
Raoul : Triptyque gothique
 Publié le 12/09/11  -  7 commentaires  -  3467 caractères  -  138 lectures    Autres textes du même auteur

Dents
Gargouille
&
Fourches patibulaires…


Triptyque gothique




Dents


Dans la vallée morte sous l'homme
Toute habillée et dans le noir,
C'est une nuit de soupe aux choux,
Où les manants pendent aux cordes.
Dans le lit clos ou dans l'alcôve
Prêtez-moi donc votre cou
Que j'y morde, que j'y morde.

Si carotide se dérobe
Je trouverai la fémorale
Et, votre suc encore aux lèvres,
Je m'en irai bien avant l'aube
Que le curé porte aux Matines.
La lune est pleine à mettre bas
Mais les dents du toit la menacent…

Le sang des laiteuses nourrices
Sent la chair fraîche et puis le vice,
Ô tendre penchant insulaire…
Prêtez-moi donc votre cou,
Ce potelé de jugulaire,
Que j'y morde, que j'y morde
Dans le silence après Complies…



*


Gargouille


Vigie des pollutions nocturnes,
Des pigeons et chauves souriantes,
À ma corniche des rapaces,
Chemin des rondes glapissantes,
Au nord aplomb de la rosace,
Je suis le cri muet du ciel.

Mes oreilles de pipistrelle
Ont le pointu du fol accent
De mon aphone La Tourette
Que je crachouille à tous les vents
Sur les petites et lasses têtes
Des pèlerins, des taciturnes.

Et, tout en exhibant les burnes
Que m'a taillées un salopiaud
Qui voulait jouer au salace,
Je confesse à Quasimodo
Avec ma trogne de grimace
Mon manque de jouvencelles.

Envoi :

Ô touristesse pose ta main
(Remercions Viollet-le-Duc)
Sur mon moussu et mon tétin
Pendant que je bave et reluque…



*



Fourches patibulaires


Coquin compère besacier°,
Une corneille boise° à l'œil
Et à tes pieds pousse une plante
Servant aux noires nigromances°.
Vois le gros rat danseur de corde
Il ronge et groint° à mon oreille
Les confidences en giguedouille°
Des Fourches de Grande Justice…

C'est là pensance° de pendu
Tourmenteor°, toi, l'entends-tu ?

Nous finirons belles terrines,
On sent nos crânes s'éplucher,
Car à nos pieds pousse la "simple°"
Qui enherbe° les chauds bouillons
Des cabarets réceptaclures°
Où l'on est prompt à s'estanchier°
En festoieries° pendant le branle°.
Brise qui grince et pue mignonne°.

C'est là pensance de pendu
Tourmenteor, toi, l'entends-tu ?



*


° Besacier : Maraudeur (portant besace)
° Boiser : Boire
° Nigromance : Magie / art secret
° Groindre : Grogner
° Simple : Herbe médicinale à un seul rang de pétale
° Enherber : Empoisonner avec des herbes.
° Giguedouille : Danse / "gigotement"
° Pensance : Chagrin
° Tourmenteor : Bourreau
° Réceptaclure : Repaire de mauvaises gens.
° Estanchier : Vider (de son sang, ou autre…)
° Festoierie : Réjouissances organisées pour quelqu'un.
° Branle : Danse régionale du XVe / grande agitation.
° Mignonner : Toucher délicatement, caresser tendrement


[Sources : Lexique partiel de Juvenal des Ursin (1360-†1431) - Martine Moulin. / Lexique des Pèlerinages de Guillaume de Digulleville - Béatrice Stumpf. / Petit dictionnaire français du Moyen Âge.]


 
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   Gerwal   
31/8/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↑
"Gothique...", ce mot a maintenant deux significations, deux définitions (merci à Wiki...):
1) Le style gothique apparaît essentiellement en Haute Picardie et en Île-de-France, les tous premiers édifices proto-gothiques naissant dans la région francilienne. La principale hypothèse pour expliquer ces lieux de naissance francilien et picard est qu'il sont essentiellement peuplés à cette époque de monuments paléochrétiens, notamment de cathédrales à murs fins, charpentées et percées de nombreuses baies...
2) Ce que l'on désigne par mouvement gothique est une sous-culture apparue entre la fin des années 1970 et le début des années 1980 au Royaume-Uni. Elle est issue des mouvements musicaux punk, post-punk et new wave et s'inspirait initialement du cinéma expressionniste allemand, du fantastique, etc...

Pour moi, seule la première définition possède un sens (je dis bien 'pour moi'...), partant de là, la première partie de ce triptyque a un je ne sais quoi d'artificiel, de convenu, de 'dans l'air du temps', avec une certaine outrance débouchant vers un morbide un peu injustifié, par contre les deux parties suivantes sont d'une grande justesse de ton (je re-dis bien 'pour moi'...) illustrant bien l'idée que l'on peut (et/ou pouvait) se faire de ces "gargouilles" et de ces "fourches patibulaires" malgré (peut-être) un emploi excessif de mots et d'expressions médiévales uniquement dans la dernière strophe.
Merci aussi pour le 'glossaire', même si je me demande si certaines définitions n'auraient pas gagné à imaginées, devinées ou comprises à demi-mots par le lecteur.

   LeopoldPartisan   
2/9/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↑
amusant de publier ceci en poésie contemporaine. Joli travail de recherche linguistique, amateur des textes de Vion, rutebeuf et autres, j'aime aussi la liberté du ton et le côté pantagruelique des mignonneries parfois sanglantes.
En fait à la relecture, je me suis retrouvé plongé dans l'univers des 4 premiers disques du groupe Ange des frères Deschamps et en particulier dans l'univers de Godevin le vilain "extrait de l'album Au delà du délire 1975"

   Charivari   
7/9/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai beaucoup aimé ce triptyque, et tout particulièrement "la gargouille", parce qu'il y a un mélange du feu de Dieu entre moderne (la "touristesse") et médiéval, entre le profane et le sacré, le très Haut et le Très bas. Il y a du Rabelais, là-dedans, j'adore. De très belles trouvailles, ça foisonne, ça trucule, bravo.

J'aime bien aussi "les fourches patibulaires", et salue l'effort au niveau du lexique, même si le traitement m'a paru moins original. Par contre, j'ai moins été emballé par le premier, les dents, avec ce clin d'oeil aux vampires, pourtant absents de l'imaginaire médiéval. Mais il est, lui aussi, très bien écrit.

   ristretto   
12/9/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
merci ! j'ai beaucoup aimé, c'est une lecture jouissive.
même si j'ai eu plus de mal avec la troisième partie - vocabulaire oblige- mais belle recherche !

un poème original, travaillé, et un lecteur comblé. Que dire de plus ?
bien aimé "ô touristesse..."

   brabant   
12/9/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Raoul,


J'achète, sans hésitation j'achète !
Bon, je suis grand amateur de Gothique, alors dans un triptyque, tu penses !


Bien "Dents", j'aurais mis 'crocs', c'est qu'il avale ce premier volet, avant que de repaître !

Violet-le Duc, je le remercie moi-aussi, pour avoir déambulé dedans le Château de Pierrefonds, morgue moyenâgeuse, doublement !

"noires nigromances" : ce mot a-t-il conduit à 'nécromancie' ? En existe-t-il de blanches ?


Les quatre derniers vers sont sublimistiques mais cette ballade villonesque est heureusement tout sauf scholastique !


Merci pour les définitions de "simple" et d' "enherber", je lorgne en moment m'amie qui m'estourbit de fines herbes, fine mouche, méfiance !



Merci à toi, au plaisir de te lire... Méfiance...

   luciole   
15/1/2016
 a aimé ce texte 
Passionnément
Peu convaincue par votre ballade maladroite, je suis allée muser au coin de celles-là qui m'ont enchantée. Pleines de trouvailles poétiques. Il y a là un mariage heureux entre la forme traditionnelle et un traitement plus contemporain. C'est une réussite.

   MissNeko   
13/8/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très original ! J ai aimé le premier poème très vampire.
Le troisième est un peu nébuleux et difficile à lire mais quel travail de recherche.
Une belle découverte


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