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Fantastique/Merveilleux
Cyrill : Troubles
 Publié le 30/04/23  -  16 commentaires  -  10273 caractères  -  120 lectures    Autres textes du même auteur

Trouble
Oh trouble set me free
I have seen your face
And it’s too much too much for me – Cat Stevens.


Troubles


La lande hirsute déployait sa monotonie dans une nuit croassante où des corbeaux becquetaient les cadavres laissés çà et là à leur disposition. La terre buvait le sang à grandes goulées, telle une éponge respirant en laissant échapper régulièrement les relents sapides de ses lentes déglutitions. Un ostinato sépulcral accompagnait ces manifestations intestines.

Bien que lugubre à souhait, je trouvais ce décor peu crédible mais j’étais dans un tel état d’épuisement que je fus tenté de laisser courir. Mes gars cependant avaient besoin d’y croire. Ils étaient flasques, peu enclins à se battre et ne ressemblaient à rien de bien vivant. Je fis poindre une aube nouvelle et déshabillai la végétation de ses frusques sinistres pour donner des couleurs plus vigoureuses à notre entreprise. Quelques tintements suraigus accompagnèrent l’extinction des étoiles.


Nous venions d’essuyer une défaite d’envergure, nous étions décimés. Il restait néanmoins à mes côtés la crème de ma soldatesque. En nous recomptant nous nous montions à plus que le minimum. Si on considère que les doigts d’une main équivalent au minimum et en me comprenant dans le nombre, rien n’était perdu. Il fallait seulement se relever les uns les autres et je donnai l’impulsion en requinquant chacun son tour mes partisans miraculés. Une tape sur l’épaule par-ci, un pincement de joue par-là. Je défroissai, époussetai, redonnai du lustre aux uniformes. Si bien qu’un vague reflet d’aujourd’hui-est-un-jour-nouveau se laissa capturer par leurs prunelles, y faisant miroiter les rêves oubliés d’une génération perdue. Faiblard, le reflet, mais en la circonstance je n’en demandais pas plus.

Je nous exhortai à nous relever de nos cendres et venger nos morts.


– Mes gars… commençai-je.


Il y avait là, alignés, Aurike la belle, mon général Anoul et Chair-à-canon, les trois clones sans décoration – ces trois-là ne me poseraient pas de souci majeur et pourraient même m’être d’une certaine utilité, à voir. Et moi.

J’ornai ma voix d’un accent slave irrésistible, dotant chaque mot d’un fort pouvoir de persuasion, mais les phrases avaient du mal à s’ordonner en ronde de camaraderie indéfectible. Le lyrisme que j’appelais de mes vœux peinait à émerger, et il était évident que mon petit groupe de survivants eût préféré mourir d’un sommeil éternel aux côtés de nos frères de lutte. Ils ne tenaient debout qu’arc-boutés l’un contre l’autre et le front appuyé sur la vitre, regardant d’un œil glauque la désolation extérieure.

Aurike se laissait glisser dangereusement, dessinant une traînée inconsolable sur la buée du verre, et je devais la soutenir fermement afin de ne pas provoquer de réaction d’effondrement en chaîne. J’en profitai pour lui glisser à l’oreille des mots doux tout en réajustant la toile de jute jetée sur ses hanches.

J’avais un faible pour cette beauté vaporeuse. Nous avions en commun une foi inébranlable en nos déboires, en notre fin inéluctable. L’absence totale d’avenir qui pesait sur nos épaules était d’un romantisme noir qui nous émouvait à en pleurer. Nous avions également le même goût désespéré pour les paysages apocalyptiques, comme celui que nous voyions par la fenêtre constellée de boue, de lambeaux de peau et de coulures indéfinissables. Au travers de ces taches, la vue qui s’offrait à nous tenait d’un surréalisme morbide. L’asphalte autour de notre bâtiment avait fondu par endroits sous les tirs ennemis, puis avait formé en s’asséchant des cratères irrésolus, gouffres sans fond absorbant la misère du monde. Les derniers humains que nous avions tenté sans succès de libérer du joug dictatorial hésitaient en se balançant sur les margelles. On les sentait irrésistiblement attirés par l’obscur inconnu de l’abîme d’où montaient les pleurs étouffés d’une soprano colorature.

Comment lutter ? Autrefois, Aurike avait une voix bien plus envoûtante encore. Je le lui soufflai à l’oreille avec toute la passion dont j’étais capable.


– Cette voix, je l’ai toujours gardée en moi, me murmura-t-elle sans un son.


Je savais bien que ses cordes vocales étaient durablement hors-service. Nos adversaires nous avaient privés de tout ce qui avait fait la générosité de notre marche séditieuse, à commencer par la puissante éloquence de nos chants révolutionnaires.


– Je sais, lui répondis-je de même.


Nous contemplâmes ensemble et pareillement mutiques la désolation qui couvrait la lande de toute son amertume mortifère.


Anoul, que notre longue conversation avait tiré de sa léthargie, s’appuya en bâillant contre Aurike et je dus exercer une poussée contraire pour éviter que notre groupe ne s’affaissât définitivement. Anoul : un bon pote, bien que souvent inconséquent. Il me jalousait la seule femme qui avait échappé à l’hécatombe. Je l’avais nommé à l’époque commandant en second pour le consoler de ses échecs amoureux, épinglant sur son habit tous les galons imaginables à l’occasion de cérémonies fastueuses.

C’était le bon temps, aimait-il à se rappeler, mais force était de constater qu’il avait perdu de sa superbe. Pantalon râpé, veste rapiécée, délavée, casquette de travers et épaulettes déglinguées lui conféraient une allure tout à fait grotesque. Une blessure au crâne mal recousue l’avait définitivement mis hors course sur la question des femmes, et je ne lui conservais son grade qu’à titre honorifique. Resté très à cheval sur la hiérarchie militaire, il exigeait de ses subalternes une obéissance aveugle et me portait au pinacle. Tant que nous étions retranchés dans cette redoute, je l’avais laissé passer ses nerfs sur les clones et croire à l’utilité primordiale de sa fonction. Du moment qu’il ne touchait pas à ma promise. Mes gars, l’esprit gourd depuis notre réclusion, avaient à peine réagi quand Anoul avait ordonné une action d’éclat destinée à réduire en miettes l’ennemi.

À présent, plus personne ne doutait que nous étions dans l’impasse. L’action d’éclat avait foiré dans les grandes largeurs.


– Anoul a foiré dans les grandes largeurs, dis-je à Aurike.

– Hmm…


Elle me regarda en coin, un sourire moqueur aux lèvres.

Je décidai, pour changer de sujet, de montrer à tous qui décidait ici et mis les dernières touches au décor, afin de relever le niveau trop faible de notre souffrance morale. Un vent tiède agaçait les buissons surgis comme de sombres augures de la terre craquelée, faisant voleter une fine poussière de pétrole. Celle-ci s’agglutinait en nuages épais que la lumière d’un soleil factice ne parvenait plus à traverser.

Ce paysage en noir et blanc m’inspira des vers d’un autre siècle, empreints d’une sublime mélancolie. Aurike me pressa de les déclamer devant nos hommes, peu importait l’incapacité dans laquelle nous nous trouvions d’émettre un son. Pourquoi pas. Je laissai les rafales de vent enfler progressivement puis s’engouffrer dans des sacs plastiques déchirés qu’avaient amarrés quelques branches retorses d’arbres malingres. Il en advint une ouverture musicale d’une délicatesse désenchantée que j’écoutai gagner en puissance avant d’introduire mes dodécasyllabes qu’Aurike doubla alors d’un contrepoint exalté. Je pinçai aux fesses Anoul afin qu’il imprimât un tempo invariable à coups de tête répétés sur la vitre. Il s’y soumit à contrecœur, conscient de son rôle de pâle exécutant et d’autant plus contrarié que la violence de l’action ne faisait qu’ouvrir davantage la cicatrice infâme lui barrant la tempe. Il en résultait des battements à étrange effet de succion, mais il faillit cependant me voler la vedette. La régularité rythmique plongea nos hommes dans une transe quasi chamanique. Flairant le danger, je me hâtai de reprendre la main grâce à une improvisation de borborygmes scandés en total contretemps. Interloquée, Aurike ne put que me suivre en vocalisant au petit bonheur la chance une façon de scat.

Nos soldats sortirent alors de l’hypnose à grand renfort d’onomatopées jouissives et de claquements de doigts. Nous étions, du moins le croyais-je, sauvés. Car si j’avais réussi à préserver mon ego de l’ambition monstrueuse d’Anoul, il n’en demeurait pas moins que nous en étions à jeter aux orties toutes les valeurs qui avaient fait jadis notre fierté victimaire. La liberté spirituelle dont nous disposions soudain grâce à cette musique autonome se révélait être le nouvel opium des peuples destiné à nous distraire de véritables enjeux sociétaux.

Je réfléchissais à ces problèmes sans en aviser mes gars, car je voyais bien qu’ils commençaient à se désolidariser de mes élans idéalistes. Aurike elle-même ne se tenait plus. Dans la lourde fumée des cigares, elle se déhanchait lascivement et dodelinait de la tête au milieu des garçons qui tapaient la coinche en sirotant leur vodka. L’ambiance était à l’hédonisme et rien ne subsistait de nos aspirations à la vacuité existentielle. Anoul avait repris du poil de la bête et misait ses médailles de guerre sans égard pour leur caractère sacré, auquel il ne croyait plus. Goguenard, il malaxait les mollets d’Aurike qui s’était mise à danser sur la table de jeu. Je devais me rendre à l’évidence : mes camarades de toujours étaient lentement aspirés par un ultra-conformisme déprimant.


Je tentai un dernier changement de décor sans grande conviction, faisant planer sur la lande une ambiance fin-de-mondiale sans le moindre accompagnement musical par un effet de nul et non avenu. Aucun résultat. Fou de rage, hurlant et gesticulant, je balayai d’un geste violent de l’avant-bras mes cinq bonshommes dont une bonne femme du rebord de la fenêtre. Ils churent à terre dans un bruit mou de chiffons, leur corps dégageant d’âcres nuées de squames. Les âmes pouvaient attendre meilleure opportunité, je m’en battais provisoirement les testicules.


J’entendis alors frapper à la porte. Prestement, je fis glisser la troupe sous le lit. Je m’y assis sans parvenir à éviter le grincement geignard des ressorts, puis entra la clique en blanc susurrante et perfide, portant flacons et seringues qui s’entrechoquaient dans un grelottement satanique sur un plateau virginal. Pris de remords, je jurai silencieusement de ne jamais trahir mes fidèles compagnons, fût-ce sous la torture. C'est alors que mon esprit et mon corps se grippèrent, comme pris de court dans une gangue d’imbécilité.


 
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   Asrya   
12/4/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
Ce n'est pas mal écrit, on ne peut pas dire ça.
La structure narrative est relativement cohérente, les phrases sont bien écrites, sur la forme, pas grand chose à remarquer, ça se lit convenablement.
Le style manque un peu de "percutant" malgré tout, alors que le début du récit tisse quelque chose de prenant, la lente démoralisation des soldats engendre presque un certain ennui à la lecture. Ce n'est pas suffisamment rythmé, cela manque d'émotions, c'est difficile de se projeter dans l'humeur des personnages et l'ambiance globale de cette fin qui approche.

Puis un passage assez... déroutant avec Anoul qui se "déhanche lascivement" et qui se met à "danser sur la table de jeu" ; vu le contexte, j'ai du mal à me le figurer, quant à la remarque du narrateur, je ne comprends pas cet "ultra-conformisme déprimant". Je ne vois pas le côté ultra-conformiste qui est cité.
Je dois passer à côté de quelque chose.

La chute arrive bien penaude pour donner un semblant de vraisemblance à cette gangue fantasque de guerre ; il s'agit simplement d'un individu, à priori "interné", qui n'en a pourtant pas particulièrement l'air. Il s'invente simplement une histoire avec de petits personnages, tout ce qui a de plus "normal" ; un caractère peut-être "enfantin" mais qui a tout de sain.
Je ne vois pas bien l'intérêt d'en arriver là.

Pas convaincu par le déroulement de l'histoire qui me paraît assez creux, même s'il y a une intention derrière, je n'en doute pas.

Merci pour le partage.

PS : "je m’en battait provisoirement les testicules" , quitte à s'en battre quelque chose, les "couilles" m'auraient paru plus spontané.

   Donaldo75   
15/4/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
J’ai trouvé ce texte riche, créant un univers particulier ; la fin éclaire bien tout ce qui a été exposé auparavant et permet à mes petites cellules grises de réconcilier le tout. A cet égard, la forme est aboutie. Ai-je aimé ? Pas complètement. Je trouve que c’est surchargé, que la narration pèse parfois des tonnes en termes stylistiques ce qui a irrité ma lecture à plusieurs reprises et d’ailleurs j’ai failli abandonner en cours de route. Je suppose que c’est le risque dans ce genre, quand l’univers est très travaillé avec pléthore de sémaphores narratifs, de figures de style j’en passe et des plus détaillés. Il y a beaucoup, à boire et à manger, un fouillis dont je comprends l’objet au vu des phrases de fin mais qui me semble quand même « too much ».

Je salue quand même la performance.

   hersen   
16/4/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
J'ai vraiment aimé ce texte, pour l'écriture d'une part, que je trouve très aboutie, mais aussi pour la montée en puissance du début. Les trois premiers paragraphes me laissent un peu dans le doute, on ne sait pas trop où on va.
Mes gars, commençai-je...
A partir de là, l'univers se précise, l'idée se renforce : on est où, là ?

Je suis très intriguée au fil de ma lecture, mais bien ancrée dans l'uniers de l'histoire, car ne pas savoir où on va, si on aime bien le chemin, n'est pas un problème. De toute façon, on fait ça tout le temps dans la vraie vie.

Et j'arrive en fin de lecture, et moi aussi je mets la troupe sous le lit en même temps que le narrateur. Et j'ai aimé faire ça, ça me donne une intimité avec lui, et je referme la porte et je le laisse avec ses démons.

Le ton est vraiment juste, c'est à dire qu'il donne une note légère à l'histoire d'un gars qui elle, ne l'est pas.
Chacun son monde et après tout, on peut le partager.

Merci de la lecture.

   Alfin   
16/4/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Très beau texte, rempli d'images, de sons et d'odeurs. Un mouvement crescendo qui nous tient en haleine malgré la difficulté que représente la surabondance descriptive de cette fresque saturée.

Un peu de simplicité dans le choix des mots aurait certainement donné plus d'air au lecteur, mais la densité nauséeuse des mots rend cette lecture aussi oppressante que la situation vécue par le protagoniste.

Nous voyageons donc avec difficultés dans les méandres de son enfermement, peut-être de sa folie, de son interrogatoire…

Nous ne le saurons pas.

   Anonyme   
30/4/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
En lisant ceci :
Je fis poindre une aube nouvelle et déshabillai la végétation de ses frusques sinistres pour donner des couleurs plus vigoureuses à notre entreprise. Quelques tintements suraigus accompagnèrent l’extinction des étoiles.
j'ai cru à l'immersion du narrateur dans un jeu vidéo où il modifiait à loisir les paramètres environnementaux ; la mention de la vitre contre laquelle s'affaissait Aurike m'a alors paru bizarre.
Pour moi, la révélation finale de la situation est vraiment venue à la toute fin, au dernier paragraphe. Si je la trouve un peu simpliste, proche de la monstrueuse ficelle narrative « tout cela n'était qu'un rêve », elle m'apparaît aussi efficace, la dernière phrase poignante. Je crois que ce dernier paragraphe aurait davantage d'impact, et de logique, conjugué au présent.

Sinon, j'ai été vraiment emportée par l'ambiance de déréliction générale, et le décalage mental qui s'installe par touches de plus en plus confirmées et convaincantes à mon avis. De belles descriptions ! Un texte réussi, pour moi, mais dont la conclusion, d'un point de vue purement narratif, me laisse un peu réservée.

   Disciplus   
30/4/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
Troublant "Trouble"! Si nous voulons bien nous laisser embarquer dans cette étrange histoire de soldats perdus dans un décor irréel, doit-on pour autant subir cette avalanche de mots superfétatoires et verbeux.
Nous comprenons qu'il faut, pour justifier la chute, que le texte soit mystérieux, illogique, voire énigmatique, mais le style abscons et cabalistique avait tout pour me perdre.
Par respect et courtoisie pour le travail des correcteurs et des lecteurs en espace libre qui ont validé le texte, je me suis astreint à continuer ma lecture jusqu'à la fin.
Comme Socque - (Bien le bonjour) - j'ai soupçonné que nous naviguions dans un jeu vidéo. L'idée semblait intéressante. Perdu ! La fin me laisse sur ma faim. Trop fade, trop rebattu. Fâcheux et un poil désagréable.

   jeanphi   
30/4/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Un style proche de la génialerie à mon sens. On ne s'improvise pas écrivain, certains commentateurs vous l'auront bien fait comprendre, mais le partage en vaut la chandelle par l'originalité rare, et l'aisance à produire un langage claire procédant hors des canons d'écriture et des sentiers battus.
Contrairement à vos deux précédentes nouvelles, vous ne cherchez pas ici une écriture conventionnelle, un bon ou un mauvais point selon les avis de chacun. Cela me permet de lire quelque chose de vraiment peu commun, espérant pour vous que Ken Follett ne passe pas dans les parages !

   Jemabi   
30/4/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime un peu
Ce qui frappe d'abord, c'est la richesse de l'écriture, une profusion de mots et de tournures qui donne parfois le tournis mais devant laquelle on ne peut que tirer son chapeau. Cette maîtrise parvient dès le début à créer une atmosphère et à rendre captivant le récit. Pourtant, au bout d'un certain temps, j'ai eu l'impression que ce récit tournait en rond et, en tant que lecteur, j'ai finalement perdu patience à trouver un sens à cette gesticulation de quelques soldats perdus dans un labyrinthe de décors changeants, même si je comprends que leur côté obssessionnel peut déboucher sur une métaphore, comme dans le film "Onoda". Très peu d'éléments nous font peu à peu glisser vers le retournement final. J'en aurais personnellement mis plus, pour alimenter les surprises d'un récit somme toute assez sage s'il se déroule vraiment dans la tête d'un déséquilibré. Mais encore bravo pour le style.

   plumette   
1/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
Tout en étant admirative d'une richesse lexicale indéniable, je ne peux dissimuler que j'ai trouvé ce texte étouffant. Accaparée par la forme, j'ai eu un peu de difficulté à suivre le narrateur dans son histoire.
Une histoire qui se veut visuelle me semble-t-il mais dont les images trop complexes à mon goût m'ont empêchée de bien voir ce dont il s'agissait.
Pourtant, il y a un univers, une ambiance grâce à un travail qui mérite d'être salué.
Pour ce texte très loin de moi et de mon genre d'écriture! mais que j'ai apprécié un peu comme une expérience, je me suis posée la question de l'appréciation de l'écriture: si je mets "aboutie" et non pas "très aboutie" c'est parce que la forme que je reconnais comme étant très soignée a pris trop de place. J'espère que je me fais comprendre.
la chute m'a permis de reconsidérer tout l'ensemble à l'aune de ces "troubles" et je trouve que c'est très habile.

A te relire

   Angieblue   
1/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime un peu
Une histoire bien étrange. Si j’ai bien compris, il s’agit d’une personne internée qui joue aux petits soldats.
Je n’ai pas super accroché, mais je reconnais un beau travail sur l’écriture. J’ai adoré les deux premières phrases. Elles sont superbes et n’ont rien à envier aux plus grands auteurs classiques.
« La lande hirsute », « une nuit croassante » qui renvoie aux corbeaux dont il est question plus loin. Bien trouvé aussi la terre qui boit le sang telle une éponge.
D’entrée, ça annonce une couleur, une atmosphère. Mais, après, j’ai été un peu déçue. Il y a une poésie, une délicatesse, une sensibilité qui ne colle pas trop avec le tableau morbide et fantastique annoncé.
Par exemple, quand vous dites :
« Une tape sur l’épaule par-ci, un pincement de joue par-là. »
« J’ornai ma voix d’un accent slave irrésistible »
« J’avais un faible pour cette beauté vaporeuse »
En fait, ça ne fait pas très viril dans un contexte de guerre.

J’ai tiqué quand j’ai lu cette phrase :
« Je fis poindre une aube nouvelle et déshabillai la végétation de ses frusques sinistres pour donner des couleurs plus vigoureuses à notre entreprise. »
Je me suis demandé qui était le narrateur, ça m’a intriguée. La chute m’a éclairée, mais l’explication aurait pu être plus fantastique qu’un simple jeu avec des figurines. Non, en fait, je trouve qu'il y a trop de sophistication, de délicatesse, de manières chez le narrateur. ça m'a un peu endormie au lieu de m'envoûter, de me troubler.

Par ailleurs, j’ai eu du mal à comprendre les lieux et leur succession. A un moment, les personnages sont dans une voiture, puis ils font la fête dans une sorte de bar. A chaque fois, on ne sait pas trop comment…Ok, notre metteur en scène, maître du jeu, fait des changements de décor, mais il m’a manqué quelque chose pour accrocher à l’histoire, plus d’action peut-être car ça ronronne un peu…

En somme, l’idée est bonne, l’écriture excellente, mais ça manque d' ingrédients fantastiques et psychédéliques pour me fasciner et m’entraîner dans ce théâtre macabre créé par un esprit troublé.

   JohanSchneider   
3/5/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Ce n'est pas avec un déluge lexical, une avalanche d'adverbes et un tsunami d'adjectifs qu'on emportera mon adhésion.

Exemple, les "flacons et seringues qui s’entrechoquaient dans un grelottement satanique sur un plateau virginal" auraient gagné en crédibilité et perdu en ridicule en se contentant de s'entrechoquer sur leur plateau, sans plus de fioritures.

Cette surenchère langagière qui ne connaît quasiment aucune trêve de la première à la dernière ligne n'a pour seul résultat que d'asphyxier le fil narratif, tué net dès la fin du deuxième paragraphe et qu'aucune soi-disant prouesse "stylistique" ne vient ressusciter.

   Cyrill   
2/5/2023

   Tiramisu   
2/5/2023
Bonjour Cyrill,

Pas de doute sur la qualité de ton écriture, et sur ta capacité d’utiliser un vocabulaire riche et varié. La chute est bien vue. Il y a un univers intéressant créé ici.

Mais … il est difficile pour moi de visualiser les scènes. J’ai essayé de comprendre pourquoi j’ai cette difficulté à être emportée par ton texte. A mon avis cela ne va pas assez loin ou plutôt ce n’est pas assez concret pour rendre l’ensemble vivant et donc prenant.
Je crois que ce qui me gêne, c’est que c’est un narrateur qui écrit, ce n’est pas un narrateur qui vit l’action, tellement les phrases sont construites avec un vocabulaire recherché. Tout est pensé et structuré. Alors bien sûr, le narrateur invente, mais il n’invente pas au point d’être dans le vivant voire dans sa folie. Il manque de l’émotion brute, surtout quand on connaît la chute. En gros, l’impression que j’ai, c’est un auteur qui écrit sur un narrateur qui en train d’écrire, pour moi cela met trop de distance.
Merci pour cette lecture.

   Dimou   
4/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Bonjour Cyrill

Tout d'abord ce que je constate c'est que tu as conféré une grande intelligence à ton narrateur ( c'est lui le fou mais c'est moi qui doit sortir le dictionnaire... ), et une imagination fertile ! enfantine dirais-je, car il joue encore aux petits soldats..

"Je trouvais ce décor peu crédible", "mes gars....ne ressemblaient à rien de bien vivant" : Je pense que dés ce passage tu donnes une piste quant à la chute. Mais à la première lecture je ne me doutais encore de rien.

Ce personnage me fait penser à l'homme qui parle à Bruce Willis à l'asile dans le film "l'armée des douze singes", en costard avec des chaussons roses ; ce dernier est conscient d'être malade et est plutôt cohérent dans son discours ( qui est fantasque certes ).

Comme le héros de ta nouvelle, un genre de "doux-fou" ( au passage sympa "fin-de-mondiale", bonne formule, je la mémorise pour une future conversation ), et qui, à y regarder de plus prés, n'est pas si fou que ça : il semble l'être surtout en présence des autres ou plutôt des infirmiers, je cite : " c'est alors que mon esprit et mon corps se grippèrent comme pris de court dans une gangue d'imbécillité", est-ce à cause des médicaments ou des médecins ? c'est nébuleux. quoi qu'il en soit c'est ici qu'il déraille et pas avant j'en suis persuadé.

En tout cas, avec ce vocabulaire profus et ces scènes variées, cette chute qui se laisse désirer juste ce qu'il faut, ton huit-clos ne m'a pas ennuyé une seconde. Une écriture travaillée qui à nécessité beaucoup de temps et d'énergie créatrice pour sûr. Bel effort ! A très bientôt

   Malitorne   
5/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Malgré des phrases surchargées qui rendent la lecture parfois pénible, j’ai bien aimé l’atmosphère étrange et énigmatique qui se déroule tout au long du récit. On se pose mille questions pour essayer de comprendre et tout se dévoile à la fin, d’une façon pas vraiment originale cependant. C’était donc un fou, ah ouais, d’accord ! Ne fait pas Shutter Island qui veut…
C’est quand même bien essayé, la tension est palpable et plutôt réussie.
Par contre, ce qui me hérisse les poils au plus haut point, c’est cette imagé éculée de la psychiatrie : médecine punitive et sans âme. Ce malade va se prendre une piqûre dans le cul, ça lui apprendra à délirer ! D’une, les injections on les fait dans des conditions bien précises : lors de phase d’agitation ou pour administrer des molécules actives sur le long terme. Ce n’est pas le cas de votre patient. L’infirmier aurait simplement dû lui proposer des gouttes relaxantes. De deux, si vous saviez le nombre de patients qui aimeraient rester en HP ! Ils ont le gîte, le couvert, une équipe aux petits soins, des assistants sociaux qui se démènent pour leurs papiers…. L’extérieur est angoissant, menaçant, l’hôpital un refuge. Donc, svp, Vol au-dessus d’un nid de coucou c’est du passé.

   Pouet   
7/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Salut,

de ce que j'ai lu il me reste comme une allégorie de l'Espoir, oui, avec un grand eux , la solitude menant sans doute à l'aliénation si ce n'est aux couvents d'aliénés.
Le combat. Les rêves. L'utopie.
Demeure une modernité médiévale dans la prise de position, dans le "choix" qui devrait s'imposer mais qui louvoie, bienséant dans son confort de circonstance.
Car, en effet, la vie est courte. Alors bon.
Les quartiers sanglants sont plus durs à avaler que les pavillons bien cuits.
La lucidité intermittente n'est que rarement le clou du spectacle.
Alors le combat vain et transitionnel, chatouiller l'universel au sein d'un groupuscule qui ne saurait changer la couleur du laid. Mais boire par renaissance...
Voilà quelques modiques élucubrations que m'auront inspiré ce texte fort bien écrit naviguant sur le fleuve de l'intemporalité . Un texte qui dit. Du moins qui murmure à mon oreille.
Les visions sont troubles et l'œil sec ne saurait traquer les limpidités.


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