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Sentimental/Romanesque
ili : Jo [Sélection GL]
 Publié le 28/08/14  -  10 commentaires  -  10223 caractères  -  85 lectures    Autres textes du même auteur

Quand Jo s'en va…


Jo [Sélection GL]


C’est presque le matin. Il y a Jo sur le balcon, dans sa peau blanche, sur laquelle elle a posé une chemise.

Je n’aime pas quand elle met cette peau. La lumière diffuse peine à découper sa silhouette diaphane.


Elle me tourne à moitié le dos. Je ne saurais dire si elle m’a entendue.

Son turban noir tombe au creux de son cou, et la ligne qui les sépare lui tranche la gorge. J’aperçois en haut de sa joue un cil blond, comme une feuille d’automne sur le point de tomber, comme une goutte de pluie sur une vitre, ou une larme au bout du nez.

Ça sent le printemps. Il fait à peine jour, un peu violet peut-être. La fumée de sa cigarette s’enroule dans l’air comme un serpent, et elle-même est si pâle qu’elle menace de s’envoler.

Je la regarde quelques instants, suspendus aux rubans du jeune soleil.


Elle tourne la tête vers moi lentement. Dans ses yeux bleus il y a un grand vide qui veut l’engloutir.

Déjà ma Jo n’est plus vraiment. Elle a un sourire mélancolique, avec des coins un peu perdus.

Son corps étique semble lui-même perdu, perdu dans des chemises trop grandes, perdu dans ce qu’il fut, dans tout ce qu’il n’est plus, perdu dans le ciel.


Je voudrais la serrer dans mes bras, la serrer assez fort pour qu’elle ne s’envole pas, mais déjà je la sens se briser au creux de ma poitrine et se fondre dans le printemps de l’air.

Alors je ne fais rien et elle semble triste que je la regarde si mal.

Derrière elle le ciel se délave, le jour renaît, la nature sort de l’apnée nocturne.

Elle sait que je ne dirai rien, car cela fait longtemps que je me tais.

Elle se lève et c’est elle qui me serre dans ses bras frêles.

Ma petite colombe blanche.


Le soir, quand nous regardons la télé ensemble, elle me caresse les cheveux avec attention. Ça ne dure jamais longtemps mais dans ces moments-là elle semble moins morte en dedans ; il y a même une lueur diffuse dans le trou de ses yeux. Elle semble heureuse presque ; je la regarde, elle me regarde aussi. Nous nous enlaçons les mains. La télé est un peu trop fort et nos doigts gourds. Pourtant ça donne une ombre de douceur, cette maladresse, un éclat de bon souvenir. Nous ne restons pas très longtemps ainsi, juste assez pour qu’un arrière-goût de regret répète nos actes le lendemain.


Et chaque matin Jo va fumer sur le balcon. Dans la semaine je vais au boulot ; il faut réfléchir un peu, parler sourire et s’asseoir beaucoup ; quand je rentre je retrouve ma colombe l’air rêveur de trop de solitude, et nous nous installons devant la télé, lundi mardi mercredi ; jeudi elle jeûne et on se serre un peu plus fort ; vendredi Jo a sa chimio et je la vois partir le matin en ambulance, puis je la retrouve dans son lit le soir et il ne faut pas la toucher, pas plus que samedi ; dimanche ça remonte, elle veut que je l’emmène au parc, et la nature répare son corps de porcelaine égrotante, pour le vendredi d’après.


Un jour quand je me lève, Jo n’est plus là. Depuis quelque temps elle se plaignait de mon silence.

Je vais fumer une clope à sa place sur le balcon.

Je pleure un peu, car je n’ai jamais fumé.


Et tout le temps je pense à ma Jo sur le balcon, je me demande où elle est partie.

Je descends les poubelles, elle est chez sa mère. Une femme longue et un peu sèche, toujours bien coiffée, la bouche en croissant de lune. J’imite sa petite voix sèche pleine de bon sens. Elle exagère quand même cette fille, d’être siii froide avec toi, toi qui es siii malade.

Ça m’énerve alors j’envoie valser les poubelles et continue ma route.

Elle est chez son ex. Cet homme dont elle ne voulait pas parler, qu’elle pleurait parfois. La violence de cette possibilité me prend aux intérieurs. Je l’écarte violemment.


Je rentre dans le parc. On est vendredi et il est cinq heures du matin. Pas un chat ne trouble les chemins de terre tranquille, sur lesquels l’ombre des platanes dessine en filigrane des visages. Jo est chez une autre amie. Une autre fille avec des cheveux qu’elle peut caresser, avec une voix et des mains chaleureuses. Qui lui fera mal sûrement, plus tard, comme moi je lui fais mal. Jo disparaît souvent. Jo s’envole et Jo revient.

Ma petite colombe blanche…


Je me suis allongée dans une herbe doucereuse. C’est bête mais tout cela a perdu sa beauté. Le décor est comme hypocrite. Le ciel est brodé de nuages sans profondeur. Des cadavres d’oiseaux déchirent l’aube mourante. L’herbe impeccable n’est plus qu’un papier collé par inadvertance sous les arbres, effrités par le haut et prêts à se désagréger par le bas de leurs racines qui ne semblent plus tenir à rien. Il faut se lever, partir.


Jo revient toujours.

Elle sait quand rentrer. Lorsque l’attente devient une longue plaie imprécise où grouille la douleur. Lorsque je la crois partie pour toujours. Jo sait, ça peut prendre deux jours comme plusieurs mois. Et la sonnette tinte, ma colombe est de retour.

Les yeux mouillés, la peau encore plus blanche si c’est possible. Cassée mais là, encore en vie, dans un éclat intermittent. Elle a mal, aussi mal que moi à ce moment-là. Nous sommes toutes les deux brisées, et je ne sais pas très bien pourquoi. Pourquoi Jo s’envole et Jo revient, pourquoi ce manège, ce regard défiant quand elle rentre, celui qui dit « tu vois ? », comme une ritournelle.


J’ai quitté le parc menteur pour autre chose de plus vivant. Je ne sais pas encore où. Plus loin, un peu plus loin. Je m’engage dans de sombres ruelles. Il n’a pas plu depuis longtemps mais le sol reluit. Tuyaux fuyants, égouts bouchés et poubelles dégoulinantes. Les murs suintent une humidité crasseuse.

Avant Jo, je venais beaucoup ici. Je m’arrêtais au pied d’une interminable paroi et regardais les nuages passer dans les flaques d’eau. C’est beau des morceaux de ciel dans de l’eau souillée, des nuages qui s’amoncellent dans les creux étroits des pavés, mais Jo ne verrait pas. Peut-être encore cette histoire de bave de crapaud sur la blanche colombe.


Une pensée s’arrête dans le ciel.

Avant Jo. Cela fait si longtemps. Quelques lignes griffonnées sur des pages ensanglantées. Des mots en forme bavure, des pans entiers effacés par la pluie ou les larmes, brûlés par la traversée d’un désert trop long, grignotés par les larves de l’oubli. Il faudrait se concentrer, pour trouver où Jo apparaît, trouver le fil de son premier rire, l’ombre mouvante de notre rencontre. Mais peut-être cela casserait-il quelque chose.

Puis il est trop tard.

Les nuages continuent leur route, et je les suis.


Soudain cela fait deux jours. Deux jours comme cinquante longues années qui pendent de tout leur long en travers de la chambre. Je m’y empêtre souvent.

Parfois je vais sur le balcon, pour y allumer une cigarette. Alors je la regarde se consumer quelques minutes, en tire une petite bouffée et l’éteins. Je ris doucement ; je vais chopper la même saloperie. Dans dix, vingt ans. Jo ne sera plus et je la reverrai en moi. Je reverrai ses yeux bleus mourir lentement, ses cheveux tomber dans les miens, ses cils se détacher un à un. C’est une idée gênante mais les nuages ne veulent plus bouger.

La brume se lève et donne aux choses l’aspect humide du passé.


Jo ne reviendra pas, cette fois.

Le tonnerre gronde.

Je suis debout sur le balcon alors que le jour laiteux se délaie dans les ténèbres. Ça sent le printemps. Ça sent la fin. Jo ne reviendra pas, plus, jamais. On dirait un mensonge. Une vérité en laquelle rien ne veut croire. Je fume les cigarettes en entier maintenant, quand le jour devient nuit et la nuit le jour. Le reste du temps j’attends, affalée dans mon lit comme la plage accrochée le long de l’eau, avec une immobilité et un rapprochement macabres.

Le boulot a appelé, peut-être même a-t-on sonné à la porte, une ou deux fois.

J’attends ma colombe au balcon, j’attends sous la pluie et dans le vent sur ce balcon où passent à peine deux chaises côte à côte, sous le soleil qui torture les ombres et la lune qui se dilate à n’en plus finir avant de disparaître derrière des nuages tuméfiés.


Que faire sinon attendre ?

L’attente indécise bloque désormais tout accès à la chambre de ses lourds lambeaux âpres. Bientôt les paquets de cigarettes sont entièrement écrasés dans le cendrier. Je pleure toujours en fumant, pourtant ce n’est plus la première fois. Je pleure toujours ma Jo disparue, pourtant ce n’est pas la dernière.


L’attente s’est épuisée et est tombée au sol. J’ai débranché le téléphone.

J’ai sûrement perdu le boulot, la miette d’estime que la mère de Jo n’a jamais eue pour moi, et peut-être la tête. Et peut-être moi tout entière. Et peut-être Jo.

Cela fait plusieurs jours que je sens qu’elle ne reviendra pas. Il y a cette absence d’elle grande comme le monde qui s’est fichée dans ma gorge à n’en plus sortir. Et surtout il y a cette odeur de fin dans l’air, entêtante, celle des fruits pourris et de la terre mouillée en boue.


Sans l’attente, c’est le vide, tout le vide des infinités d’univers qui se saisit du ciel et l’embrase. Le jour s’éteint dans une lente explosion, celle des fleurs qui éclosent et des arbres qui grimpent au ciel. Bientôt la lune talée se penche à la fenêtre ; sa face ronde apaise la plaie que le soleil a ouverte en se retirant.

La chambre noire est parsemée de formes blanches peintes au couteau. Au dehors, la lumière pisseuse d’un réverbère dessine des profils d’adolescentes le long de branches implorantes. Et tout cela n’est plus qu’un lourd tableau maladroitement arrimé à mon corps, dont les coins me transpercent la tête au moindre mouvement.

Je sens que Jo n’est plus du tout. Une pointe de douleur noire lancine, au creux de ma poitrine.


Que faire sinon oublier ?

Je me concentre faiblement, compte des secondes qui depuis longtemps n’en sont plus. Cela fait dix jours. Jo se remet d'une autre chimio. Il faut que je l’oublie. Pour faire disparaître cette attente et cette pointe entêtantes. Pour disparaître tout à fait.


Il faut que je l’oublie. C’est impossible. Jo est en moi comme ce douloureux tableau qui repose sur l’arête de mon nez. Jo reviendra mais il faut d’abord ne plus y croire. La nuit ne semblera que quelques minutes mais il faut d’abord s’endormir.

Alors quoi ?

Que faire sinon mourir ?


 
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   Anonyme   
29/7/2014
 a aimé ce texte 
Bien
À mon sens, ce texte présente un déséquilibre dans le "trop de pathos". Le sujet, il est vrai, incite nettement à y pencher ; c'est bien pourquoi (à mon avis) il importe de s'en méfier quand on écrit sur quelque chose d'aussi délicat que la mort de l'être aimé.

Dans la plus grande partie du texte, j'ai le sentiment que vous évitez bien cet écueil du pathos : la description angoissée de Jo ne révèle pas immédiatement qu'elle est malade, on peut avoir l'impression d'un amour malheureux. Quand le gros mot "chimio", si lourd de sens, est lâché, je ne vois plus que lui. Le danger est grand qu'il ne vienne ravager toute l'histoire comme ce qu'il représente ravage le corps.
Mais vous conservez de la tenue, l'écriture se déroule avec sa beauté sereine et contrebalance bien, pour moi, l'horreur du sujet.

"Parfois je vais sur le balcon, pour y allumer une cigarette." C'est ici, pour moi, que le texte bascule, que le larmoyant gagne. La narratrice est déchirée par cette certitude non confirmée de la fin de Jo, certitude qui ne peut apparemment prendre fin qu'avec le retour effectif de l'aimée ; personne, donc, ne se donnerait la peine de la prévenir si Jo était morte ? J'ai le sentiment, pour la première fois, que la volonté de faire peser au texte tout son poids de tragique vous a décidé ou décidée à sacrifier la vraisemblance.
La fin du texte continue sur le même ton ostensiblement désespéré et, pour la première fois, je repère des clichés (peut-être étaient-ils là sans me gêner, sublimés par le style) :
"Jo ne reviendra pas, plus, jamais. On dirait un mensonge."
"Je pleure toujours en fumant, pourtant ce n’est plus la première fois. Je pleure toujours ma Jo disparue"
"la lumière pisseuse d’un réverbère"
"Une pointe de douleur noire lancine"

Pour moi, donc, le dernier tiers du texte n'est pas à la hauteur des deux premiers, j'ai le sentiment que vous avez cédé à la tentation de la facilité du tire-larmes. Je comprends qu'avec un pareil sujet, ce n'était pas facile d'y résister ! Je le regrette parce que, sinon, j'ai vraiment trouvé l'écriture fort belle bien qu'un peu trop appuyée, manquant par moments de simplicité, comme par exemple ici :
"un cil blond, comme une feuille d’automne sur le point de tomber, comme une goutte de pluie sur une vitre, ou une larme au bout du nez"

   Anonyme   
28/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Les nombreuses répétitions de "Jo" m'ont un peu agacée. Je ne comprends pas l'intérêt d'autant de répétitions du prénom "Jo" qui n'apportent rien.

Sinon j'aime le regard que pose cette amie sur Jo mais alors pourquoi je ne ressens aucune émotion à ma lecture, je ne dis pas qu'il n'y a pas d'émotion mais je me rends compte que je suis blasée. Peut-être parce que des textes comme le vôtre j'en ai lu tellement, ces textes que j'aime.

Le narrateur est beaucoup dans la contemplation, de Jo et de ce qui l'entoure à l'extérieur, c'est étonnant que les descriptions soient principalement le dehors, c'est comme s'il voulait s'évader mais tout est triste, c'est très bucolique tout de même et je n'arrive pas à saisir le parallèle entre l'humeur du narrateur et les éléments, la faune et la flore, je trouve qu'à ce niveau-là la fusion n'est pas très réussi exemple:

-"J’ai quitté le parc menteur pour autre chose de plus vivant. Je ne sais pas encore où. Plus loin, un peu plus loin. Je m’engage dans de sombres ruelles. Il n’a pas plu depuis longtemps mais le sol reluit. Tuyaux fuyants, égouts bouchés et poubelles dégoulinantes. Les murs suintent une humidité crasseuse."

ou:

- "Sans l’attente, c’est le vide, tout le vide des infinités d’univers qui se saisit du ciel et l’embrase. Le jour s’éteint dans une lente explosion, celle des fleurs qui éclosent et des arbres qui grimpent au ciel. Bientôt la lune talée se penche à la fenêtre ; sa face ronde apaise la plaie que le soleil a ouverte en se retirant."

C'est trop extérieur, pas assez intérieur. Je n'arrive pas à voir le reflet de la mélancolie dans cette description ou alors peut-être qu'elle n'a rien à voir avec la mélancolie du narrateur et dans ce cas-là je ne vois pas ce que ça fait là.

Le titre est Jo mais le narrateur parle beaucoup de lui finalement, beaucoup de "je" peut-être que l'émotion que je n'arrive pas à ressentir vient du fait que le narrateur parle beaucoup de son mal-être, et beaucoup moins de la souffrance de Jo, bien que je comprends que les proches d'une personne mourante soient dans la douleur. Il se lamente beaucoup, et on ne connait pas les émotions de Jo.

J'aime beaucoup ce passage:

"C’est presque le matin. Il y a Jo sur le balcon, dans sa peau blanche, sur laquelle elle a posé une chemise.
Je n’aime pas quand elle met cette peau. La lumière diffuse peine à découper sa silhouette diaphane."

Mais je suis partagée, j'aime bien sans plus, ça manque d'intensité et ça va un peu dans tous les sens.

ÉDIT: Après relecture concernant les passages relevés sur l'évasion et errance extérieur j'ai changé d'avis, ils donnent du relief, de la vie à l'histoire. Ce qui l'entoure est à l'image de sa souffrance. C'est bien le reflet de sa mélancolie.

   LeopoldPartisan   
20/8/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Curieux texte que celui-ci... C'est un peu comme un long poème en prose dédié à un être aimé à la folie que le crabe ronge de plus en plus. Ce crabe serait plutôt un vampire qui à force de prendre possession de Jo, la rend transparente.

Malgré une écriture souvent malhabile où l'émotionnel prend trop souvent le pas sur le littéraire, c'est assez prenant. Le fait de ne dévoiler les raisons du lent effacement de Jo, pousse le lecteur à lire jusqu'au bout (ce fut mon cas). Attention, ce procédé peut énerver et faire que l'on abandonne rapidement cette lecture.

Attention il vous faudra en votre qualité d'auteur prendre le recul nécessaire pour transfigurer l'oeuvre.

   MariCe   
28/8/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour Ili,
L'écriture est belle, toute en délicatesse. Certaines phrases sont exquises à lire.
Je regrette simplement que le texte tire intensément sur le ressort du pathos, mais votre style m' a incitée à vous suivre jusqu'au bout. A bientôt sur un registre plus gai...

   Uranie76   
28/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Si j'osais, je dirais "trop de Jo, tue Jo"..

Une quarantaine de fois que le prénom est évoqué. La première moitié du texte j'ai aimé, c'était une psalmodie qui diffusait une émotion tout en retenue.

Puis l'émotion a été mise à nue, et le Jo répétitif a commencé à m'être lassant. Un texte d'une belle facture, et qui ne manque pas de poésie. Quelques belles expressions, mais y'a quelque chose de décousu à la fin qui nous laisse sur notre faim, on perd le fil.

Il aurait gagné en force si ces allers-retours de Jo n'avaient pas traîné en longueur je pense. Une chose est sûre, je préférais quand la douleur et la souffrance de la séparation étaient suggérés plus que décrits, je les ressentais mieux paradoxalement dans la première partie.

ll me donne envie de vous lire ailleurs et autrement.

   Coline-Dé   
28/8/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'aime.
Même s'il y a des défauts, j'aime ce texte : on le sent vivre, palpiter, tout cru, tout frémissant et ça, pour moi, ça vaut toutes les savantes constructions de phrases !
Il pourrait s'arrêter un tout petit peu plus tôt, laisser le lecteur écrire la suite, dans la mouvance...
Certaines formulations peuvent paraitre précieuses, mais quand on aime... c'est précieux, forcément, et il n'y a rien là de péjoratif : alors les mots précieux sont à leur juste place. Dans ce texte, je sens circuler de la vie, des sentiments mélangés, et beaucoup de liberté.
C'est ce qui me parle.
Continuez, Ili !

   Anonyme   
28/8/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Vous touchez le sensible.
Jo se serait appelée Isabelle, je conçois que cela eût pu devenir lassant. Mais "Jo" ce diminutif tendre pouvait selon moi se répéter comme vous l'avez fait.
Vous parlez de l'attente qui évolue en la personnalisant de façon bouleversante, vous décrivez le sentiment de la disparition qui ne veut pas s'avouer, du constat de l'absence définitive...

Ne rien écrire de plus excepté que... si vous n'avez pas vécu cela personnellement, vous devez être très épris de quelqu'un...

   Asrya   
29/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un texte charmant, tout en finesse.
Dès les premières lignes, je me suis douté qu'il se tramait une histoire de cancer ; notamment avec ce contraste entre "la peau blanche" et le "turban noir" qui "lui tranche la gorge" (magnifique image au passage)

C'est une belle histoire, d'amitié, d'amour ? Entre cette narratrice et son amie, cette Jo. D'ailleurs, il m'a fallu du temps pour comprendre qu'il s'agissait d'une narratrice et non d'un narrateur. Peu d'indices sont laissés dans votre texte quant au sexe de ce dernier.
C'est d'autant plus surprenant. S'agit-il d'une histoire d'amour entre deux femmes ? J'avoue ne pas avoir bien compris (ça m'a un peu gêné de ne pas en être certain...)
A propos de cela, je trouve que ce récit manque de... d'intensité. L'amour, la passion, ou l'amitié ; du moins les raisons qui poussent la narratrice à un tel apitoiement sur cette Jo, ne sont pas évoquées et... du coup, j'ai eu du mal à me mettre à sa place, à ressentir sa peine. Je l'ai lue, mais ne l'ai pas éprouvée.

Alors oui, c'est bien écrit, très bien écrit, poétique, mais je n'ai pas réussi à me mettre à la place de votre narratrice. Je n'ai pas compris la relation qui unit les deux protagonistes.
Je souhaite qu'il s'agisse d'un sentiment amoureux, peut-être que c'est autre chose. Je ne sais pas. Je suis privé de la certitude ; cela me chagrine.

Merci malgré tout pour ce texte,
J'espère avoir la possibilité de vous lire à nouveau,

Asrya.

   Alice   
29/8/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Un texte magnifiquement écrit, peut-être cependant un peu trop long pour ce qu'il a à dire. Peut-être aurait-il mieux valu couper quelques passages, ou à tout le moins les alléger, après le départ de Jo. Pour ma part, les répétitions du nom m'envoûtent, et plusieurs phrases sont si criantes de poésie qu'elles trouent l'âme. Pour une obscure raison, j'ai surtout adoré le "C’est une idée gênante mais les nuages ne veulent plus bouger."

La qualité d'écriture ne fait donc aucun doute, mais comme je ne suis pas du genre à m'attarder énormément sur la trame, je me contenterai d'évaluer davantage en ce sens, en disant que j'avais pas moments l'impression de perdre la beauté en la voyant trop partout. En écriture, la maxime "le mieux est l'ennemi du bien" est souvent à appliquer, et j'ai l'impression d'avoir perdu plusieurs magnifiques phrases dans une multitude de passages poético-sentimentaux. Certaines phrases auraient eu beaucoup plus de force en étant un peu moins énumérées et fournies en adjectifs (bravo néanmoins pour le vocabulaire, vous m'avez appris deux mots, j'adore), et plus servies dans la simplicité.

Je comprends que ce soit une question de style, mais quand je vois notamment "L’herbe impeccable n’est plus qu’un papier collé par inadvertance sous les arbres, effrités par le haut et prêts à se désagréger par le bas de leurs racines qui ne semblent plus tenir à rien", un peu perdu dans un paragraphe assez surchargé et dans une image très étendue (notamment par cet "impeccable" qui ne sert pas à grand chose), j'ai l'impression de me faire bombarder. Bombarder de très belles choses, certes, mais bombarder tout de même.

Les passages les plus beaux étaient selon moi les plus simples, ne serait-ce que le très incarné "Ça sent le printemps. Il fait à peine jour, un peu violet peut-être." Mais ce n'est que l'avis d'une étudiante de littérature qui se fait sans cesse répéter d'alléger et de resserrer ses phrases. Peut-être suis-je en train de voir mes propres défauts en vous ;)

Un petit passage maladroit, avec ce turban noir et cette ligne qui "tranche la gorge", à mille lieux de la qualité d'autres images, pour le reste rien ne m'a fait grincer des dents, et je n'estime pas que le texte soit trop dégoulinant côté pathos. Je crois qu'on sent très bien la douleur qui n'est d'ailleurs pas sans créer des échos en moi, sans être surchargé. Ce qui donne selon moi cette sensation de trop-plein de sensiblerie détecté par d'autres lecteurs, c'est la longueur de certains tiers et de certaines métaphores. En bref, une petite cure d'amaigrissement (sans pour autant rendre le texte "étique" (j'adooore ce nouveau mot, je vais le sortir à tous les jours :P)), une épuration du style qui multiplie un peu trop, par endroits, des bijoux qu'il faudrait laisser respirer, et le tour sera (totalement) joué.

Vous m'avez fait vivre un magnifique moment de lecture, je vous remercie et vous admire.

Au plaisir de vous relire,

Alice

   Perle-Hingaud   
31/8/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Ili,

J’ai lu votre texte en espace lecture, et je viens aujourd’hui le relire. Je retrouve les mêmes impressions : de belles qualités, mais une écriture encore en devenir.

J’aime beaucoup la subtilité de la narration, votre manière de nous faire découvrir progressivement les personnages, de ne pas trop en dire sur les liens qui les unissent (peut-être les personnages sont-ils eux-mêmes dans la confusion des sentiments, c’est du moins ce qui m’a semblé). Par exemple, j’ai mis longtemps à comprendre que le narrateur était une narratrice : ce n’est pas déplaisant de faire appel à mes neurones plutôt que de me laisser sombrer dans une lecture passive.
Sur la maladie, par contre, pas de suspens : on comprend vite (le mot turban est très évocateur pour ceux qui ont connu des malades du cancer).
La répétition de Jo ne me gène pas : répéter un nom, c’est le maintenir vivant, à flot. Une sorte de prière, de mantra peut-être.
Des phrases très poétiques, par exemple : Ça sent le printemps. Il fait à peine jour, un peu violet peut-être.
C’est très beau, on sent l’humanité derrière tout ça, il n’y a pas de triche.

Voilà ce que j’aime.
Ce que j’aime moins, c’est une certaine « préciosité », peut-être pour mettre de la distance, pour éviter ce fameux « pathos ». C’est raté, selon moi. Le pathos est bien présent, surtout dans la deuxième partie du texte. A mon sens, la fin (à partir de Que faire sinon attendre ?) mériterait de reposer pour être « récurée ».
Ça, c’est pour le pathos. Pour le « précieux », vous en émaillez un peu dans tout le texte, soit par des tournures (ces « que faire », ou ces phrases courtes en exergue), soit par des images qui, trop recherchées, nuisent à l’émotion simple. Par exemple, Il y a Jo sur le balcon, dans sa peau blanche, sur laquelle elle a posé une chemise. : c’est typiquement le genre de phrase qui m’amuse, avec ce « il y a » dont abusent certains auteurs (même sur Oniris, si si), et l’image détournée par l’effet de style.

Un texte fort, encore imparfait (selon mon avis de lectrice lambda), mais très prometteur. Grattez jusqu’à l’os et votre écriture gagnera en puissance. Vous avez déjà toute la sensibilité.
Merci pour ce beau récit, ili.


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