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Poésie en prose
Ornicar : Sans titre
 Publié le 03/01/23  -  13 commentaires  -  1410 caractères  -  447 lectures    Autres textes du même auteur

Loin, très loin des chromos habituelles de saison. Quoique...


Sans titre



Automne !
N'en déplaise à Verlaine et ses violons plaintifs, sous tes flammes mordorées, j'entends les grondements sourds des canons en campagne.
Tu célèbres tes noces de sang avec la terre, avec les hommes et serres dans ton étau le pays tout entier. Tu forges d'immenses champs de bataille où s'abîment les consciences, où s'étiole la vie. La défaite en ligne de mire de lendemains qui déchantent.

Des bataillons de socs écument les plaines en déroute rongées par l'ennui, minées par les pluies. Le deuil à la remorque des sillons, en promesse d'horizons.
Des brumes embusquées dans les vallons dépêchent au matin vers les bourgs leurs phalanges bleues d'un gaz froid et mortel.
Sur l'enclume d'un ciel ivre ou sans joie, des rouges et des jaunes crachent leur vindicte par tous les pores de leur peau parcheminée, explosent en chapelets violents, lancent dans l'embrasement général les derniers feux d'une action d'éclat, puis retombent, mutiques, dans le silence entrecoupé des bois. Sous l’œil aux aguets des stratèges du dimanche, familiers de leurs chiens renifleurs, fleur au fusil et cirrhose en bandoulière.

Novembre déjà s'installe à la lisière des jours, pousse son avantage, achève d'achever. Ses morts, ses tombes, ses monuments.
De symphonies en hécatombes de couleurs, rien d'héroïque dans le tableau. Mais dieu ! que cette guerre est jolie.


 
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   papipoete   
3/1/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
bonjour Ornicar
Automne aux couleurs de morte-saison, aux couleurs de terres ensanglantées, te voici à nouveau cadre de scénarios tragiques, où l'on s'écharpe rouge, jaune et bleu.
Automne, remplis tes sillons comme dans les plaines d'Alésia, celles de Verdun...
NB sans emphase, l'auteur nous transporte au plus près de ces carnages, qui cesseront un jour... avant de reprendre sous d'autre latitude, et tonneront les canons, et pleureront des soldats et des femmes recevant un courrier maudit !

   Vincente   
3/1/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Ambivalente poésie, serait-ce son charme premier ?

J'ai vu un titre qui se défile sous un anonymat qui serait regrettable s'il n'ouvrait la focale et laissait la suite agir sans lui.

Hors des "chromos habituelles des saisons" nous avertit l'exergue avec un "quoique…" bien peu monolithique…

C'est pourtant bien autour de la morosité mélancolique que tournent ces évocations. J'ai bien aimé le ton doucereux dans le timbre mais dur dans ce dont il parle, sans concession et avec une acuité certaine. Jusqu'à ce final plein d'ironie : "Mais dieu ! que la guerre est jolie.". Encore cette volonté de narrer ces embrasements graphiques et émotionnels, à la fois formidables d'expressivité et terribles de dévastation.
Tout cela rend perplexe, tout comme cette audace de s'emparer de ces "drôles" d'agissements humains…

   Donaldo75   
3/1/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Ornicar,

J'ai trouvé que ce poème en prose avait de la tenue, une tonalité alors que ce genre n'est à mon avis pas facile à réussir. Le thème est bien traité et la lecture est fluide, avec des images cohérentes et surtout consistantes parfois magnifiées par des formules redoutables (cirrhose en bandoulière, par exemple). Et le dernier vers est pour moi un véritable point d'orgue.

Bravo !

   BlaseSaintLuc   
3/1/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
Et oui, c'est loin de l'ordinaire, donc un original texte sur un thème,
Si souvent évoqué.
Bon l'automne n'est pas si rude partout, l'horizon, n'est pas si morne, le temps peut être doux.
Évidemment le texte vie mieux, s'il s'y trouve un peu de fracas.
Pardieu, c'est que ça cogne, c'est la guerre des couleurs, le chant du coq est rauque et la brume inquiétante.
Poésie descriptive d'une saison, réussie.

   Lotier   
4/1/2023
Le climat, la saison, la chasse… poème miroir, poème symbole d'autres drames si lointains et si proches. Pareille ambiance délétère.
Le parallèle avec la pandémie virale aurait pu être plus réaliste, mais la force poétique tient à ce gauchissement du tableau automnal vers la tragédie guerrière, comme la terrible phrase de l'Apollinaire…

   fanny   
5/1/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour,
Ainsi donc, vous réouvrez le bal de la poésie avec un texte que j'imagine écrit à l'automne, mais qui malheureusement est perpétuellement d'actualité, les guerres sont de toutes les saisons.

Novembre en porte le poids, le ciel et la terre souffrent avec les humains dans une triste communion que vous exprimez fort bien ; j'aime cette prose fluide, originale et très évocatrice.

PS : maintenant que grâce à Louis, l'inculte que je suis a compris la fin du poème, je change les dernières lignes mon commentaire : comme c'est judicieux, et quel bel hommage à Apollinaire.

Bonne journée Ornicar.

   Raoul   
4/1/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour,
J'aime assez cette prose automnale où le sang répendu n'est jamais loin, puisqu'il est même visible encore sur les feuilles. Belle idée de transformer la saison – favorite de nombreux poètes... – en carnage, en champs de bataille gazé (même si la proximité des "bataillons et bataille" me gène un peu à la lecture) puis en espace dédié aux loisirs, au pique-nique, aux agapes, puis, rendu aux inéluctables tombes. Une trajectoire intéressante, riche et bien senti.
J'apprécie aussi la précision du langage et des images qu'il fait naître.
Idée intéressante également de traiter le comportement de l'"Homme" qui toujours ne chérira pas la mer, mais la viande.
Sensible au point d'exclamation exaspéré de l'entame.
Le tout est particulier et retombe sur ses pieds : c'est ce qu'il faut, à mon avis, à la poésie en prose.
Merci pour cette lecture.

   Myo   
4/1/2023
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très aboutie
et
aime beaucoup
L'automne dans toute la cruauté de sa douce mélancolie.
Un regard multiple où se mêlent les labours, la chasse "loisir" et la chasse à l'homme, traqué tel un animal.

Je les entendais encore il y a peu, les traqueurs et leurs chiens hurlants dans la colline en face de la maison, suivi des coups de fusils à m'en donner des frissons.

Un texte de très belle facture avec beaucoup d'originalité dans les formulations. ( La cirrhose en bandoulière ... ) et cette fin qui nous bouscule.

Bravo!!

Myo

   Louis   
5/1/2023
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aboutie
et
aime bien
Cette prose poétique se présente d’abord comme l’adresse à une saison : l’automne, qui est donc personnifiée, puisque considérée comme un allocutaire en mesure d’entendre la parole proférée à son intention.
Automne est interpellé à la deuxième personne : « tu », dans un tutoiement qui le place dans une familiarité, une proximité, peut-être même une intimité avec le locuteur, dont l’implication est personnelle dans le poème, si bien que le propos poétique ne se veut pas objectif et universel, mais rapporté à la singularité du « je » qui s’exprime.
Ce que déclare le locuteur dans cette adresse, c’est que l’automne est avant tout son plutôt que couleur, sonore plutôt que coloré, ce qui s’entend plutôt que ce qui se voit : « sous tes flammes mordorées, j’entends les grondements sourds des canons en campagne ».
Automne s’entend dans la ‘voix’ des canons. L’allocution semble alors prendre place dans une interlocution. La voix du locuteur-poète répond à celle des canons. Elle répond à une violence, associée à l’automne.
Automne et le locuteur se répondent en miroir : l’un dit à l’autre ce qu’il est dans ce qu’il fait : « Tu célèbres… Tu forges… », et l’autre répond en renvoyant l’image de l’état d’âme de celui qui l’écoute.

Le locuteur-poète laisse entendre, bien sûr il ‘laisse entendre’, que son écoute de l’automne se distingue de celle d’un autre poète, bien connu.
Quand Verlaine entendait dans l’automne « des violons plaintifs », et les ‘sanglots longs’, le locuteur, lui, perçoit le fracas des canons.
Quand l’un éprouvait les langueurs de la saison, l’autre souffre et s’exalte de ses clameurs.
Pas une musique languissante et mélancolique, mais le grondement des armes, la rumeur menaçante d’une artillerie, l’éclat des couleurs.
Pas une apathie dans une ‘atonie’, mais une vigueur martiale.
Pas une lente agonie, mais des mouvements agonistiques, spasmodiques et convulsifs.
L’automne, ça explose, ça gronde, ça tonne.

L’automne, c’est tel un combat, pareille à la guerre, qu’il sonne.

La saison automnale, si elle se donne surtout à entendre, se donne encore à voir dans ses couleurs, ses « flammes mordorées » ; mais ses teintes s’entendent aussi : ‘morts dorées’, l’automne advient sous le signe de la mort.
Même les couleurs, « les rouges et les jaunes », éclatent, explosent, canonnières des coloris, expectorant leurs « vindictes » et leurs cris. Les couleurs aussi se font tonitruantes.
L’automne tinte avant d’être une teinte.
Mais avec l’automne, la vie s’éteint.

L’automne est une déclaration de guerre, une guerre meurtrière. Contre tout ce qui est vivant.
Automne sanglant.
Il unit et sépare, dans des affrontements.
Ainsi, ses noces sont « de sang ». Son union avec la terre, avec les hommes, s’avère cruelle et sanguinaire.

Mais quelle est cette artillerie qui résonne dans les tréfonds de l’automne ?
Quelle est cette « guerre » qu’il déclenche ?

Automne est un artisan, qui fabrique la « guerre », et toute la nature devient son atelier ; il serre ainsi dans son « étau le pays tout entier», « forge d’immenses champs de bataille », et du ciel fait « une enclume ».
Il fabrique l’étreinte qui entraîne chaque chose, contraint chaque être au combat, à la « bataille », à l’affrontement.
Dans ces champs de bataille, la « conscience s’abîme », et la vie « s’étiole ».

À l’œuvre et à la manœuvre des « bataillons de socs » : saison des labours ; et les socs éventrent la terre, tracent des « sillons », comme des ‘tranchées’.
Une troupe, toute une armée de tracteurs, laissent les « plaines en déroute », quand ont fui, sous l’offensive automnale, les régiments de touristes, les cohortes de voyageurs et promeneurs.

Quand les chasseurs battent la campagne, comme « stratèges » militaires, les couleurs personnifiées se battent sur « l’enclume du ciel », puis « crachent », « explosent », « lancent les derniers feux d’une action d’éclat ». Automne remuant. Automne frappant, et plein de fureur. Loin des violons anémiés et languissants.

L’automne s’achève par novembre. Mois de l’achèvement, qui «achève d’achever », mois des morts, des cimetières et des commémorations, des « tombes », des « monuments ».
Le locuteur-poète concède toutefois une musique d’automne, non pas dans les seuls violons, mais dans une « symphonie » qui ne joue pas ‘moderato’ mais ‘vivace’. Automne à la fois, dans une synthèse des opposés, mortel et vivace ; funeste, cruel et tonifiant.
Automne coloré, décoloré.

Le poème se clôt par une exclamation, pastiche d’un vers d’Apollinaire : « Mais Dieu ! Que cette guerre est jolie. »
Les guerres sont laides et ‘sales’, mais pas celle-ci, quand elle se fait l’œuvre d’un artisan qui forge des paysages, fait éclater des étincelles de couleur sur son établi, mêle les sons dans une «symphonie » ; quand l’artisan se fait artiste.

   gino   
11/1/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Je me joins aux tres commentateurs dan l'loge de c tableau.
Je ne dirai pas grands chose de plus. L'idée d'associer les couleurs de l'automne et la noiceur de la guerre est magnifique
et la réalisation en mots est à la hauteur.

Je me permettrais seulement deux remarques sur des détails.
La référence à Verlaine est inutile est inutile , elle n'joutte rien.
"la cirrhose en bandoulière". A mes oreille cela sonne faux. Il faut des dizaines d'années d'alcoolisme pour fair un foie cirrhortique.
Or ici ce snt des jeunes dans leur vingtaine et la gnole était au compte. (Henri Barbusse, Le Feu et carnets de guerre)

Merci pour cette lecture.

   leni   
16/5/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
ou est passé mon com ecriture très aboutie d'une super aisance '

J ADORE chapeau leni

   Eki   
9/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
La symphonie des violons a laissé place au grondement des canons.
C'est un texte remarquable par la qualité de son vocabulaire, la description d'une guerre impitoyable et l'ambiance maussade dépeinte comme un méchant et mauvais mois de novembre.

Je vous découvre avec ce texte et je ne manquerai pas vos prochains écrits.

Pourquoi sans titre ? Je me pose la question.

Ici, la poésie sent beau.

   Cyrill   
30/9/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Bonjour Ornicar,
Voilà l’automne de Verlaine et ses langueurs monotones relégué au rang de des petits soucis de l’ego alors qu’ailleurs et aujourd’hui la saison se voit associée à la guerre qui ronge inlassablement nos consciences.
La palette de couleurs est riche. À commencer par ces « flammes mordorées » dans lesquelles j’entends mort. Le rouge du sang, le bleu des phalanges de gaz, encore du rouge et du jaune, un feu d’artifice. Vous vous en donnez à cœur joie sur ces champs de bataille, vous n’y allez pas de main morte et justifiez par là-même ce formidable final « Mais Dieu ! que cette guerre est jolie ».
Vous invitez aussi la musique, rien moins que des symphonies pour les hécatombes, en lieu et place des violons sanglotants.
Peint par un « stratège du dimanche », dépeint par le poète, le tableau nous est presque imposé par sa force d’évocation et l’ironie rageuse du ton. Le titre lui-même, d’un anonymat plein de désinvolture, en est le prélude.
Bravo pour cette belle prose.


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