Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Policier/Noir/Thriller
Pepito : Quatre saisons
 Publié le 01/03/14  -  25 commentaires  -  11546 caractères  -  444 lectures    Autres textes du même auteur

"Pour être hanté, nul besoin de maison, nul besoin de château, le cerveau regorge de corridors plus tortueux les uns que les autres." Emily Dickinson


Quatre saisons


Été


Une de ces magnifiques matinées d’été, suffisamment avancée pour laisser exploser toute la palette de ses dorés et pas encore assez chaude pour te faire regretter de porter des habits de ville.


Tu passes par le petit parc avant de te rendre au bureau. Tu adores déambuler dans ses allées et profiter de la fraîcheur des plans d’eau. Tu flânes donc, ton journal sous le bras, dégustant par petites lampées la tranquillité du lieu. Sous un tilleul, un peu à l’écart du passage, un banc de pierre semble t’inviter à la pause. Comme tu as encore du temps devant toi, tu t’assois, prends tes aises et plonges un œil distrait dans les nouvelles du jour.


Tu viens juste d’ouvrir les "pages internationales" quand des battements d’eau affolés rompent le silence quelque part dans ton dos. Tu te retournes. Au milieu d’un bassin peu profond, une enfant effrayée tente désespérément d’atteindre le bord d’une eau où elle n’a pas pied. Elle semble épuisée, même plus la force de crier. Entre deux coulées, ses grands yeux noirs se fixent désespérément sur toi.


Pas âme qui vive aux alentours, ni parents ni badauds. Comment cette gamine a-t-elle pu arriver là ? Tu hésites un instant, enlever chaussures et pantalon ou sauter tout habillé dans l’eau ? La première solution, le temps de se rhabiller te ferait sûrement arriver en retard au travail, la seconde t’obligerait à passer la matinée tout mouillé.

Prenant brusquement une décision, tu détournes la tête, replies soigneusement ton journal et après avoir épousseté ton pantalon, tu te remets en route, déjà concentré sur les problèmes professionnels et domestiques que tu auras à résoudre dans la journée.


Derrière toi, à la surface de l’eau du bassin, les dernières bulles éclatent en cercles concentriques.


Plus tard dans la matinée, tu repenses à la noyade de cette gamine avec une pointe de regret. Pourquoi n’as-tu pas sorti ton téléphone portable et filmé la scène ? Tu te souviens alors que ton journal est dans une poubelle, jeté négligemment dès la sortie du parc.


***


Automne


Un voile cotonneux embue mon champ de vision. Je me lève à tâtons et repousse la couette d’un geste las.


Matin d’automne à la clarté blafarde, réveil plus que difficile…

C’était quoi déjà les cachetons refilés par Jeremy ?


À travers la brume ouatée, j’ai du mal à reconnaître la pièce qui m’entoure. J’ai quasiment tout oublié de la soirée d’hier et le seul souvenir qu’il m’en reste est un épouvantable mal de tête.


Trébuchant vers le centre de la pièce, j’avise la porte entrebâillée du placard. Attiré par la noirceur de l’ouverture, je fais un pas hésitant dans sa direction. Destination logique pour un écrivain qui a été.


Venant probablement de l’autre côté du couloir ou de l’étage au-dessus, une voix criarde psalmodie un fond sonore peuplé d’allusions à une gloire disparue.

Je repousse la couette – impression de déjà fait – et je continue d’avancer.


Secouant la tête, je cherche à m’éclaircir les idées. Je ne réussis qu’à augmenter la douleur broyant mes tempes. Encore une enjambée, le placard est à portée de main. Le fond reste invisible, noyé d’une ombre où affleurent deux ou trois fantômes de mon enfance.

Entraîné par le mouvement mécanique de mes jambes, je passe maintenant l’entrebâillement. Le voile blanchâtre sur mes yeux vire au noir d’encre. La voix off, devenue plus forte, continue son babil aigrelet. De tous côtés, les mots de ma déchéance traversent l’obscurité. Comme je lève les mains vers mes oreilles, le sol cède sous mes pieds. L’opaque mêlée de mots m’engloutit. Affolé, je perds le sens du haut et du bas. J’ouvre la bouche pour chercher un peu d’air, mes poumons s’emplissent de phrases tranchantes, coupures de vieux journaux.


Je sombre… sans même un regret. Trop longtemps déjà que j’attends la fin en noyant ma sécheresse d’âme dans les illusions artificielles.


Un fil ténu me retient encore. Mon nom, prononcer mon nom peut me sauver. Curieuse certitude. Qui pourrait être intéressé par le patronyme d’un écrivaillon incapable de s’écrire une mort propre ?


Le fil se rompt, je m’enfonce… enfin.


Un flash – venant de l’intérieur de ma tête – éclate mes rétines, mon dos s’arque de façon grotesque, l’impression que ma poitrine va se déchirer sous la brûlure. Un sifflement suraigu cisaille mes tympans, tandis qu’une goulée d’air limpide noie l’incendie de mes poumons. J’expire, mélange liquide/solide, hoquette glaires et à savoir quoi d’autre sur une moquette immonde.


Je râle rauque bave plusieurs fois sur le côté, la joue dans mes déjections. Les convulsions se calment dans ma poitrine.


On me pose une question.


D’un immense effort je tourne la tête vers le jeune gars en blouse blanche penché sur moi. Dans chacune de ses mains, une sorte de fer à repasser. Il répète en articulant comme un demeuré :


– Monsieur, pouvez-vous me donner votre nom ?!


***


Hiver


Volontairement, je me laisse distancer par ces garçons décidément trop bavards. Marchant serrés autour du cône de lumière, ils s’éloignent en chahutant et n’ont même pas conscience de me laisser en arrière.


Un instant agité par la lueur spasmodique de la lampe, le cimetière a repris son immobilité apparente. Je me retrouve donc seule dans l’obscurité et je devrais trembler de peur. Étonnamment, je reste calme, touchée par la sérénité du lieu. Peut-être un effet de mon imagination de jeune fille romantique, j’ai même l’impression que tout ce qui m’entoure prend une autre consistance, s’anime à mon attention, se déploie en une mélancolique fleur de nuit.


Se faufilant entre mes jambes, le vent glacial d’un hiver sans fin serpente et s’essouffle parmi les stèles. Entraînées par ses erratiques bourrasques, les scories de nuits antédiluviennes s’élèvent dans les airs, cachant une lune déjà fatiguée. À ce lugubre signal, persuadées à jamais d’être vives sous leurs chapes de marbre, les âmes crédules se réveillent. Dans ce monde maintenant noyé d’obscurité, elles oublient la cécité qui les frappe et le désarroi de leur ballet follet, tandis que le goût de terre meuble au fond de gorges vaporeuses et profondes justifie ces souffles affligés, illusions de chants déformés.


Dansant sur la sombre sarabande jouée par le vent, les âmes fredonnent une étrange complainte. L’histoire de l’une de leurs sœurs, condamnée à errer entre deux mondes pour avoir voulu quitter la vie avant que l’heure ne soit venue. La malheureuse ne se réveille que les nuits où de jeunes gens, jouant à se faire peur, traversent le cimetière. Se mêlant alors aux importuns, elle vient ancrer dans leurs fragiles consciences plaisir délicieux de la vie et peur atavique de la mort.


L’étrange mélopée s’arrête soudain, je frémis en reprenant contact avec la réalité. Les garçons se sont encore éloignés, inconscients du chagrin qui les entoure. Je cours les rejoindre, pressée de retrouver leur innocente allégresse et d’en soulager mon cœur. Déjà, dans mon dos, je sens l’amertume de doigts volages quitter à regret le dessous de ma peau. Je tends les bras vers le halo de lumière, mes mains s’effilochent et se perdent dans les ténèbres, tandis que mon être se dissout dans une noirceur que j’avais oubliée.


Un frisson parcourt le groupe de jeunes gens, ils cherchent dans le noir l’origine de ce souffle glacial venu effleurer leurs nuques.


***


Printemps


Sous le cerisier en fleur, Amélie se balance.


Le printemps guilleret a déroulé un patchwork d’herbe tendre des collines à l’horizon jusqu’au dessous de ses pieds. Après avoir repeint chaque carré d’un vert éclatant, il a saupoudré de neige le cerisier du père Grégoire et s’en est allé faire le tour des champs à cloche-pied ponctuant chaque bond d’une petite tache de jonquille.


Dans le soleil encore voilé, brillent aux oreilles d’Amélie de petites boucles dorées. Elle les porte pour la toute première fois.


Quelques semaines auparavant, sa mère était arrivée par surprise au moment où elle les sortait précautionneusement de leur cachette. Les sourcils froncés, elle lui avait demandé d’où venait cette pacotille. Amélie n’avait rien répondu. Que peut connaître une vieille paysanne de la valeur d’un bijou ? Comment lui faire comprendre la joie ressentie à la simple vue de ces anneaux de métal ? Devant son mutisme, sa mère avait secoué la tête et laissé ses deux mains retomber en un claquement mat sur son tablier. Mais depuis ce jour-là, méfiante, elle était toujours à hucher dès qu’Amélie s’éloignait trop longtemps de la maison et les boucles d’oreilles étaient restées cachées entre deux piles de draps jusqu’à ce matin.


Dans le souffle du vent aux senteurs de chèvrefeuille, Amélie se balance.


Ses sabots de bois, dont s’échappe un peu de paille, ont glissé de ses pieds sur l’herbe douce. Ils se touchent de la pointe, en un câlin retenu, comme un rappel de sa première rencontre avec Joseph.


C’était un an plus tôt, pour le bal de printemps. Dans la nuit qu’éclairaient juste quelques lampions à huile, les jeunes gens du village dansaient sous le rythme entêtant de la vielle et de la cornemuse. Amélie croisait et recroisait les garçons des fermes alentour, virevoltant à chaque passe de bourrée. Au milieu des rires et des pirouettes, Joseph lui avait souri. Pas un simple rire de gaieté, non. Un vrai sourire. Rien que pour elle.


Le cœur de la gamine avait sauté un battement et ses pieds un pas de bourrée. Pour cacher son trouble, elle était sortie de la sarabande, feignant d’être essoufflée. Il l’avait rejointe et d’un geste un peu gauche, entraînée à l’écart des danseurs sous prétexte de se reposer. Magnifié par l’avarice des lumières, l’instant était resté gravé dans le cœur romantique de la jeune paysanne. Joseph avait été plein d’une douce attention et Amélie connut ce soir-là le trouble délicieux du premier toucher, du premier frisson, puis du premier baiser.


Jouant à cache-cache avec leurs parents respectifs, ils s’étaient ensuite revus le plus souvent possible. Joseph avait eu l’idée d’aménager un petit coin douillet dans une grange reculée et ils s’y retrouvaient à la nuit tombée, peu soucieux de voir les contraintes d’adultes se mêler de leur bonheur. C’est là qu’un soir, Joseph avait offert les boucles à Amélie.


Sous le cerisier en fleurs, Amélie se balance.


Débarrassée de sa ceinture, sa blouse gonfle sous la brise légère. Le tissu ondule doucement, cachant de ses volutes un ventre déjà bien rond.


La fête donnée pour les fiançailles a duré tard hier soir. Paysans aisés, les parents de Joseph ont voulu marquer l’événement ; pour effacer la honte, diront les mauvaises langues du village. Les flonflons du petit orchestre se sont infiltrés dans toutes les maisons du hameau, jusqu’aux plus reculées, jusqu’à la chaumière de la maman d’Amélie.


La jeune fille n’a pas dormi du reste de la nuit, tournant dans son lit jusqu’au petit matin. Un peu avant l’aube, elle s’est levée pour marcher jusqu’au verger du père Grégoire, la tête pleine d’une seule pensée. Un simple prénom auquel elle n’a pas voulu croire jusqu’au jour des fiançailles.


Blandine, c’est Blandine que les parents de Joseph ont finalement choisie pour belle-fille.


Dans le soleil matinal, poussée par la bise, Amélie se balance. Son visage enfantin s’ombre déjà d’un dégradé violacé, tandis que le rude tissu de la ceinture froisse la peau délicate de son cou.


***


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   Anonyme   
15/2/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
L'écriture est vraiment de grande qualité, c'est un plaisir de lire des lignes aussi riches et ciselées. Une mention spéciale pour le chapitre Hiver et l'ambiance du cimetière. Du grand art !
Concernant l'esprit du texte et son classement dans le Laboniris, je reste plus mitigé. Je ne suis pas sûr que le fait d'écrire des histoires distinctes, sans aucun rapport entre elles, soit suffisant pour y prétendre, mais le fait est que c'est une catégorie qui obéit à des critères de sélection assez flous ! Donc à voir...
Il serait dommage, néanmoins, que vous ne soyez pas publié tant chacune de vos saisons sont réussies. L'Automne est peut-être en dessous des autres, les affres de cet écrivain ne sont pas convaincants et la situation peu claire.
Pour les saisons restantes, l'Été est excellente - même si peu crédible - le tutoiement judicieux.
Le Printemps, classique mais efficace. Bien vu cette répétition lancinante : « Sous le cerisier en fleurs, Amélie se balance. »

   Anonyme   
1/3/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
J'ai beaucoup, beaucoup aimé les première et quatrième histoire. Simple, lapidaire et glaçant.

Cela dit, j'ai une objection concernant la construction de l'ensemble. Vous avez présenté votre texte en Laboniris, je pense donc à une volonté réfléchie d'écriture. En l'occurrence, une déclinaison sur les quatre saisons. Très bien. Seulement, vous choisissez deux récits à la première personne du singulier, une à la deuxième du singulier, une à la troisième du singulier. Je pense que la déclinaison aurait été mieux marquée en déclinant sur quatre personnes, comme sur quatre saisons. Par ailleurs, l'automne (outre que cela m'agace de voir mis en scène un narrateur qui écrit, mais ça c'est mon problème) n'est pas suffisamment caractérisé pour moi. Cela se passe en intérieur, la seule notation de la saison est "Matin d’automne", ce qui est tout de même assez facile, l'âge du narrateur n'est pas vraiment précisé (on peut être écrivain raté à trente ans, rien n'empêche), bref j'ai eu l'impression que cette histoire était là pour compléter la série mais n'y avait pas sa place.

Je trouve (mon avis, rien d'autre) que votre déclinaison des saisons n'est pas suffisamment marquée stylistiquement. Sinon, à mon avis, les mini-histoires ainsi contées le sont avec efficacité.

[EDIT : Le Comité Éditorial a finalement choisi de publier le texte sous une autre catégorie.]

   Acratopege   
4/3/2014
 a aimé ce texte 
Passionnément
Eh bien quelle belle surprise que ce texte. Le titre un peu bateau m'avait presque découragé de me lancer, mais il prend toute sa saveur après lecture. Quelle cruauté splendide dans ces quatre récits qui n'ont l'air de rien et sont écrits dans un style léger et gentiment lyrique. Le contraste entre la forme édulcorée et le contenu terrible de ces histoires fait qu'on n'en sort pas indemne si comme moi on se laisse prendre. J'ai en particulier été secoué par l’Été et le Printemps, de véritables bijoux d'atrocité. Bravo, faites-nous une multitude d'autres saisons en enfer!

Edition. Découvrant l'auteur et sachant qu'il n'aime pas les notes, je retire celle que j'avais mise en espace lecture tout en restant admiratif de cette perle onirienne!
Edition. Bon, je remets mon appréciation, puisque tout le monde en met!

   Anonyme   
18/2/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour

Assez désespérés, assez confus - le sens pas la structure - je me suis laissé porté par les mots. La première saison surprend, incite à poursuivre. J'ai cherché un lien, n'en ait pas trouvé.
Je ne sais pas trop quoi en penser ni quelle impression cette lecture m'a laissé. Bizarrement, à la fois fugace et tenace.
Etrange. Mais si c'est effectivement le résidu de quatre rêves distincts ou s'entremêlant alors cette sensation vaguement cotonneuse s'explique peut-être.

   Pascal31   
1/3/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'avais lu cette nouvelle (ou plutôt ces 4 micro-nouvelles) en Espace Lecture sans savoir quel commentaire apporter. J'ai été gêné par le fait qu'il n'existe aucun lien entre les différentes saisons et encore plus dans le fait que le temps (dans le sens "météo") ne soit que très secondaire. Chaque partie aurait pu indifféremment se passer à n'importe quelle saison, en fait.
Du coup, ça m'a un peu embêté. Et pourtant... je ne peux que reconnaître la qualité de l'écriture et les frissons qui m'ont parcouru à la lecture de ces histoires terribles ancrées dans un ordinaire qui les rend encore plus fortes (en particulier les segments "Été" et "Printemps").
Dommage, vraiment, de ne pas avoir trouvé un lien à tout ça, ou de ne pas avoir davantage insisté sur les saisons qui forment le titre de ce mini-recueil.
Cela reste malgré tout une bonne lecture.

   Robot   
1/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Je déteste qu'un titre ne tienne pas ses promesses, comme s'il était là juste pour attirer le chaland.
Par contre, chacune de vos quatre histoires m'a retenu. J'ai apprécié dans les récits le léger décalage avec la réalité qui désoriente. Bien aimé le 1er et le 4ème récits. Dommage que vous n'ayez pas tissé de lien entre vos histoires, mais était-ce possible ?...
J'avais vu votre nouvelle en pré lecture et je me demandais "pourquoi le Laboniris ?" qui est à mon sens un lieu d'expérience littéraire, alors que vos récits sont d'une écriture assez classique. Cette faute d'orientation ne m'avait pas permis de le commenter alors.

   Anonyme   
1/3/2014
 a aimé ce texte 
Passionnément
Salut Pepito,

A mon avis tu dois fréquenter deux ateliers d’écriture bien distincts : celui des beaux jours – printemps/été – et celui, plus tristounet, qui va vers l’automne/hiver.
Je suis prêt à payer pour fréquenter le premier, par contre j’aimerais bien qu’on me rembourse le forfait du deuxième.

Printemps/Eté sont deux histoires simples, bien racontées, bien écrites.

Dans « Eté » le narrateur interpelle (accuse ?) la société dans son ensemble. Le « tu » s’adresse à tout le monde, tant il est vrai que l’égoïsme et le cynisme sont la cravate et le nœud pap de nos costumes et coutumes modernes. Pour une fois j’accepte qu’on s’en prenne à moi, tant je suis certain de m’être bandé les yeux plus d’une fois, en espérant quand même que c'était pas devant une eau profonde ou une corde pour se pendre.
Le style est limpide, beaucoup moins chargé en fausses parures, manteaux clinquants ou fourrures à poils longs, que celui de l’Automne/Hiver. Autrement dit, je te préfère en slip que tiré à quatre épingles. Privilégie les tenues légères et tu pourras goûter un bon café dans la salle d’attente de Gallimard ou d’un autre.

C’est que t’as une sacrée plume, trop souvent dévoyée par l’envie de bien faire :
« Dansant sur la sombre sarabande jouée par le vent, les âmes fredonnent une étrange complainte. »

ou encore :

« Dans ce monde maintenant noyé d’obscurité, elles oublient la cécité qui les frappe et le désarroi de leur ballet follet, tandis que le goût de terre meuble au fond de gorges vaporeuses et profondes justifie ces souffles affligés, illusions de chants déformés. »
C’est vrai, ça fout les jetons ! Six adjectifs dans la même phrase. Brrrr…… Voilà sans doute pourquoi j’aime pas les récits fantastique/merveilleux… Enlèves-en les 3/4 et tu verras comme on se sent bien avec juste un slip et des chaussettes.

Eté et Printemps sont deux vrais bijoux. Ce que t’as écrit de mieux depuis que je te lis. Laisse tomber les belles manières, c’est pas pour toi. Laisse ça à ceux qui enfilent un smoking pour rester chez eux.

Je note juste Eté/printemps. T’as pas à subir mes à priori pour les saisons froides.

Ludi,
en maillot sur le pont, en train de lire "Eté" avec la secrétaire de Gallimard (qui n'a pas voulu s'habiller en mettant le sien).

   Donaldo75   
2/3/2014
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
J'ai bien dormi. C'est le commentaire que m'inspire cet écrit, ce texte qui ressemble à un exercice d'écriture, réussi certes, avec un thème imposé. Du coup, contrairement à mon habitude je ne l'ai pas lu une seconde fois. Mais comme l'auteur a quand même passé une batterie de tests avant d'arriver ici, je vais commenter plus longuement:
* l'été: convenu
* l'automne: le meilleur, de loin, réussi
* l'hiver: vide, sidéral
* le printemps: réussi
DOMMAGE

   Anonyme   
2/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Aï Pepito. Désolée, je peux pas m'en empêcher. Pour un gars qui se revendique pipi/caca/prout (notez que c'est bien aussi), je trouve que vous ne manquez ni de sensibilité ni de poésie. Les textes que je préfère : Eté et Printemps, parce qu'ils sont aboutis et sans doute parce qu'ils sont cruels, question de goût. L'écriture est maîtrisée et en plus elle "sent". Ne vous inquiétez pas, je suis une bestiole, je ne veux pas dire qu'elle pue, je veux dire qu'on peut renifler, voir tout ce qui se passe autour et ça me plait particulièrement d'avoir quelque chose à inscrire sur ma rétine. Automne : je pense que c'est un peu confus et que ça mériterait d'être retravaillé. Quand j'ai lu "Attiré par la noirceur de l'ouverture...", j'ai cru qu'on allait partir sur un truc fantastique, un univers parallèle et ça m'aurait bien plu allez donc savoir pourquoi.
Hiver : un petit bémol, je trouve parfois que vous voulez trop "chiader" (j'ai parfois le même travers. La viande de porc c'est bon quand c'est mort). Exemple : "Dans ce monde maintenant noyé d’obscurité, elles oublient la cécité qui les frappe et le désarroi de leur ballet follet, tandis que le goût de terre meuble au fond de gorges vaporeuses et profondes justifie ces souffles affligés, illusions de chants déformés." Personnellement, je préfère les phrases courtes.
Bref, encore.

   Anonyme   
2/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Pepito... Certes, aucun lien entre les quatre saisons mais quatre mini nouvelles très bien écrites avec, en ce qui me concerne, un coup de cœur pour l'Eté et surtout le Printemps...
Bravo et merci pour cette fort agréable lecture...

   Merome   
3/3/2014
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Pas moyen d'accrocher. Quatre morceaux d'histoires inachevées a priori sans lien entre eux. Je n'en retire rien. Le style seul ne me suffit pas, il me faut plus de fond.

   Anonyme   
3/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Celle de l'hiver a eu toute mon attention.
Très bien écrit, belle maîtrise de la langue de Molière.

Bon je chipote je chipote mais Jeremy, serait mieux avec des accents :P

   Bidis   
3/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
- Eté : l’écriture dessine excellemment bien le décor, l’atmosphère et la scène. Je n’ai pas bien compris les deux dernières phrases et les trouve superflues. J’aurais trouvé parfait que le simple (mais horrible) mot de « regret » en soit la chute.
- Automne : Je ne suis pas très sûre qu’une crise cardiaque fasse l’effet décrit, en tout cas, ce récit ne me convainc pas.
- Hiver : L’atmosphère de cimetière est bien rendue mais il est dommage que l’auteur ait absolument voulu donner une chute inattendue à ce récit. Si les choses avaient été explicitées petit à petit pour s’éclaircir complètement à partir du milieu du récit, celui-ci en aurait eu à mon avis plus de force et d’impact sur le lecteur.
- Printemps : Ouche ! Là par contre, je suis cueillie…
Je trouve que c’est le morceau le plus scotchant, mais je préfère l’écriture du premier (Eté). Je trouve qu’il y a une différence de qualité d’écriture entre ce premier morceau et les autres, mais je ne suis pas très capable de dire pourquoi.

   senglar   
3/3/2014
 a aimé ce texte 
Passionnément
Salut Pépito,


Tu ne pouvais pas trouver meilleur patronage que celui d'Emily Dickinson pour ces quatre récits noirs. Je me suis dit tout de suite qu'il ne pouvait y avoir qu'une énorme qualité sous un tel incipit. Quatre courtes nouvelles sous l'égide de qui a consacré sa vie à écrire des quatrains, le clin d'oeil m'a paru évident mais c'est le seul sourire de ce sang bien noir dont je me suis abreuvé avec délice.

Une seule question car la lecture a suffi à mon bonheur : Pourquoi l'Automne a-t-il rendu la vie à ce micheton cachetonné ? J'ai tellement aimé le capiton biercien (il est là quelque part aussi cet immense très grand) des autres saisons.

Pour sûr il y aura du vent dans les branches des héliotropes du côté d'Amherst dans le Massachusetts...

Mais voilà que je frissonne !

Félicitations !

brabant

   Pimpette   
4/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai tellement détesté la première nouvelle que je ne m'en remets pas

Tout ça est monstrueusement bien écrit quand même!

Pepito, je me vengerai...plus cruellement que par une simple notation!

   alvinabec   
4/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Pepito bonjour,
Aurais-je affaire avec un maître es nouvelles brèves me dis-je au seuil du quatrième texte?
Intentions délicieuses qui vous chatouillent la peau juste comme il faut.
Ds le détail, ETE, j'ai adoré mais pas compris la nécessité de rappeler le journal jeté.
AUTOMNE, c'est pas mal vu, je suis qd même sceptique qt à la conscience et la pensée d'un patient en fin de partie, c'est Après le choc électrique externe dû au défibrillateur qu'il peut penser, être sujet à des réflexes vagaux divers, avoir mal plutôt à la poitrine qu'à la tête (si on est sur du narco-choc, c'est pas des 'fers à repasser' non plus) mais la chute est bonne.
HIVER, fresque rapide à l'accent poétique, ne me semble pas raccord avec les trois autres tableaux. Le style en étant bien différent, je le trouve incongru à cette place.
PTEMPS, même si l'intrigue est un grand classique, vous le traitez de façon tout aussi efficace qu'économe, on voit parfaitement le cerisier.
A vous lire...

   dowvid   
4/3/2014
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Ouan, ouan, difficile.
Je n'ai pas accroché, parce que trop décousu. Et dans le style, dans les personnages, le temps des histoires, les sentiments, etc. Asynchrone ?
C'est bien écrit et il y a de belles images. Du cynisme dérangeant pour l'été, l'automne et l'hiver m'ont laissé un peu froid (ça doit être de saison), et le printemps m'a surpris. Je n'avais pas vu venir la fin et le balancement maudit.
J'ai quand même réussi à tout lire, ce qui n'est pas toujours le cas. Ça signifie que le style ne m'a pas déplu, les images.
Mais l'incohérence me chicotte, quatre petits tableaux qui gagneraient à être séparés selon moi.
Merci pour la lecture

   Dyonisos   
5/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une lecture savoureuse et agréable... Le sujet est traité avec originalité par une plume talentueuse...
J'ai apprécié ma lecture et il n'est pas exclus que je revienne...
Bravo Pepito.

   Pepito   
6/3/2014

   melancolique   
6/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonsoir Pepito,

J'ai aimé ces petites histoires racontées avec une grande sensibilité, et un style fluide et de qualité. Je trouve pourtant dommage d'avoir regroupé les quatre sous un seul titre pas très évocateur.

J'ai bien aimé le premier texte, il reflète pour moi l’égoïsme et la cruauté de notre société. "Automne" et "hiver" sont bien écrites mais elles ne me touchent pas beaucoup.

Par contre "Printemps" c'est juste une merveille, j'ai lu avec dans la tête cette image de jeune fille heureuse sur une balançoire, et puis il y avait cette fin...c'est un texte très réussi. Bravo!

Au plaisir de vous relire.

   fergas   
24/3/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Pepito,

Quatre récits inégaux, mais marquants par leur noirceur. Le premier et le quatrième me semblent plus achevés et plus percutants. La brièveté des textes et la qualité des chutes font irrésistiblement penser à Fredric Brown, surtout en ce qui concerne le premier, l’été. Brown avait d‘ailleurs publié une histoire de noyade d’un enfant, mais le personnage principal était plutôt victime d’une erreur de jugement, que d’un accès d’égoïsme et d’irresponsabilité comme dans votre texte.
En ce qui concerne les trois autres textes, les noms de Jean Ray et de Claude Seignolle me viennent particulièrement à l’esprit, pour l’atmosphère sinistre des situations.
L’écriture est de qualité. On a envie de relire tout de suite chaque récit, et d’ailleurs c’est ce que j’ai fait.

   Marguerite   
15/4/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Pepito,
Je n’ai finalement que très peu de choses à dire sur ce texte…
A la première lecture, j’ai cherché pendant deux ou trois saisons le rapport entre tous ces gens, puis j’ai compris qu’il n’y en avait pas… Que le texte, classé en « Policier/Noir/Thriller » était en fait juste noir, très noir.
Du coup à la deuxième lecture, j’ai « juste » lu et j’ai pu pleinement apprécier l’écriture nickel que vous nous offrez.
Bravo.
P.S. : Si je devais désigner une saison que j’ai moins aimée, ça serait l’été, peut-être le tutoiement m’a-t-il un peu gênée. Et c’est aussi à cause de lui que je me suis attendue à une histoire à plusieurs de points de vue, qui m’a au début induit en erreur sur les intentions de ce texte.

   widjet   
14/7/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Si Été et Printemps relate des faits, Hiver et Automne font plutôt état de sensations. Ma préférence va plus naturellement vers le saisons chaudes qui paradoxalement sont les plus glaçantes mais les deux récits "froids" ont un côté hypnotique qui séduit également. L'écriture, dans son ensemble, est assez remarquable (je ne sais pas le nombre de jours/mois qui séparent les premiers textes de Pépito des derniers, mais les progrès sont stupéfiants) et mon seul regret est apparemment l'absence de liant entre ces micro nouvelles. Amusant enfin de voir que les personnes de la partie de chasse se retrouve dans le dernier récit (avec des statuts sociaux différents).

Pepito (me) surprend à bien des égards. Je viens de découvrir (ou de réaliser) que j'ai affaire avec un excellent "touche à tout".

W

   carbona   
3/9/2015
 a aimé ce texte 
Pas
Bon, je n'ai pas accroché du tout et ce, à cause de l'écriture beaucoup trop sophistiquée pour moi.

J'ai bien aimé ce passage à la fin de "été" : "Plus tard dans la matinée, tu repenses à la noyade de cette gamine avec une pointe de regret. Pourquoi n’as-tu pas sorti ton téléphone portable et filmé la scène ?" qui ne manque pas d'humour.

"automne et hiver" < rien du tout

"printemps" < la chute est chouette "Blandine, c’est Blandine que les parents de Joseph ont finalement choisie pour belle-fille."

   Annick   
6/9/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
La saison que j'ai préférée : l'hiver.

Le passage que j'ai préféré : "Se faufilant entre mes jambes, le vent glacial d’un hiver sans fin serpente et s’essouffle parmi les stèles. Entraînées par ses erratiques bourrasques, les scories de nuits antédiluviennes s’élèvent dans les airs, cachant une lune déjà fatiguée. À ce lugubre signal, persuadées à jamais d’être vives sous leurs chapes de marbre, les âmes crédules se réveillent. Dans ce monde maintenant noyé d’obscurité, elles oublient la cécité qui les frappe et le désarroi de leur ballet follet, tandis que le goût de terre meuble au fond de gorges vaporeuses et profondes justifie ces souffles affligés, illusions de chants déformés."

D'une beauté surréaliste mais la poésie qui émane de ce paragraphe n'est pas hermétique ! Donc, pour moi, du grand art.

Globalement, quatre nouvelles intéressantes, bien construites et agréables à lire.

Pour ergoter un peu, je dirais que le fil conducteur qui relie ces nouvelles (les saisons) me paraît un peu artificiel.

Pour terminer sur une note positive, je dis bravo pour cette magnifique nouvelle qu'est "l'hiver". Quelle sensibilité ! Quelle écriture !


Oniris Copyright © 2007-2023